Le Canada a lancé une nouvelle série de dénonciations hypocrites des « violations des droits de la personne » au Venezuela – alors même qu’il est resté silencieux lorsque son alliée au Bangladesh a abattu des centaines d’étudiants et de travailleurs.

Cela nous rappelle une fois de plus que lorsque le gouvernement canadien parle de « droits de la personne », ce n’est que des mots vides pour masquer ses intérêts impérialistes.

La relation spéciale entre le Canada et le Bangladesh

Depuis la mi-juillet, le Bangladesh est en pleine révolution. Des millions de personnes se sont jointes à une grève générale à l’échelle du pays qui a mis l’armée et la police au pied du mur. En réponse, le gouvernement a pris des mesures de répression, arrêtant plus de dix mille personnes et en tuant plus de 400.

Le gouvernement Trudeau s’est ainsi retrouvé dans une position inconfortable : la première ministre Sheikh Hasina, surnommée la « Dame de fer de l’Asie » par The Economist, était une alliée de l’impérialisme canadien.

Le Bangladesh est une source de main-d’œuvre bon marché pour les entreprises canadiennes; un centre industriel « à faible coût », « même par rapport aux normes régionales », selon une délégation parlementaire canadienne qui s’est rendue sur place en 2013. Et pour aider le régime bangladais à garder les travailleurs dociles, le Canada lui envoie des millions de dollars en aide militaire, en armes et en formation policière militarisée.

Le gouvernement canadien s’est abstenu de dénoncer le régime alors qu’il massacrait des centaines de civils. Ce n’est qu’après la victoire des masses sur Hasina et la fuite de celle-ci, le 5 août, que le gouvernement canadien a soudainement découvert « les violations des droits de la personne, les décès, la torture, les arrestations arbitraires et la force meurtrière utilisée contre le peuple du Bangladesh » – des crimes perpétrés par son alliée, avec des armes qu’il lui avait fournies.

Bien entendu, le Canada s’est abstenu de soutenir les manifestants.

Beaucoup de tapage autour du Venezuela

La volte-face du Canada au sujet du Bangladesh contraste fortement avec ses dénonciations constantes du gouvernement de Maduro au Venezuela. Le même cabinet Trudeau a passé des années à essayer de faire tomber le gouvernement de Maduro en soutenant des coups d’État, en imposant des sanctions et en conspirant avec l’opposition de droite.

L’hypocrisie est flagrante. Le gouvernement canadien soutient la leader de l’opposition de droite au Venezuela, Maria Corina Machado, au nom de la « démocratie » et des « droits de la personne ».

Pourtant, on parle ici d’une politicienne qui a soutenu le coup d’État militaire de 2002 contre le gouvernement élu d’Hugo Chavez : elle était l’une des signataires du « décret Carmona », qui prétendait invalider la constitution, le système judiciaire et le parlement et a tenté de placer au pouvoir le chef de la chambre de commerce. Quiconque ferait cela au Canada serait en prison, et ne participerait pas aux élections.

Si Machado et ses amis prenaient le pouvoir au Venezuela, ils seraient tout à fait disposés à imposer une dictature – semblable à celle qui a été renversée au Bangladesh – pour vaincre la résistance populaire. Ils l’ont d’ailleurs déjà tenté à plusieurs reprises, avec le soutien du Canada.

Il y a amplement de raisons de critiquer Maduro. Mais la « répression » de l’« opposition » vénézuélienne n’en fait pas partie. L’opposition de droite soutenue par le Canada participe aux élections et organise des émeutes de droite – et, contrairement au Bangladesh, la réponse du gouvernement n’est pas de tirer dans la foule.

L’hypocrisie impérialiste dans toute sa splendeur

Si l’on compare les réponses du gouvernement canadien aux situations au Venezuela et au Bangladesh, l’hypocrisie est évidente. Derrière cette contradiction se cachent les froids intérêts économiques de la classe dirigeante canadienne.

Le gouvernement vénézuélien est une épine dans le pied des impérialistes occidentaux, dont le Canada, depuis la révolution bolivarienne qui a porté Hugo Chavez au pouvoir en 1999. Chavez a mis fin à la braderie du pétrole du Venezuela – qui possède les plus grandes réserves au monde. Les pétrolières occidentales profitaient jusque-là de la complicité du gouvernement pour acheter son pétrole sous le prix du marché mondial. Les États-Unis, avec l’aide de leurs alliés comme le Canada, tentent depuis ce temps-là de remettre la main sur le pétrole vénézuélien, et ont tenté à de nombreuses reprises de renverser le gouvernement pour en installer un plus coopératif.

Alors que le Canada ne se gêne pas de traiter Maduro de « dictateur », l’impérialisme canadien soutient de véritables dictateurs dans le monde entier, lorsque c’est dans son intérêt.

Bien entendu, le Canada affirme que sa politique étrangère vise seulement à encourager « la démocratie, les droits de la personne, l’État de droit et la bonne gouvernance ». 

Pourtant, il arme des monarchies, des régimes de droite et des gouvernements putschistes en Israël, en Jordanie, en Arabie saoudite, à Singapour, en Turquie, dans les Émirats arabes unis, au Pérou et en Ouzbékistan, pour n’en citer que quelques-uns, qui écrasent les droits démocratiques et répriment brutalement les travailleurs et les jeunes.

Fondamentalement, c’est parce que les impérialistes ont besoin de garder la population des pays qu’ils exploitent docile. Dans les pays anciennement colonisés en particulier, l’exploitation brutale de la classe ouvrière est maintenue par la force. Elle exige des dictateurs comme Hasina. Le reste n’est que relations publiques.