L’École mondiale de la Tendance marxiste internationale (TMI) a réuni en Italie, fin juillet, plus de 300 militants venus des quatre coins du monde. Une vingtaine de militants de La Riposte socialiste/Fightback ont participé à cette semaine de discussion et de formation.
Le centenaire de la révolution russe était à l’honneur, avec sur ce thème onze plénières et commissions, au total. Cependant, la première journée fut consacrée, comme toujours, à la situation internationale et aux perspectives qui s’en dégagent, notamment sur les plans politique et social. L’ensemble des interventions illustraient la profonde crise du capitalisme, qui n’épargne aucun pays. Même ce havre de stabilité qu’était l’Autriche, ces dernières décennies, se trouve désormais plongé dans une sérieuse crise politique. Les situations au Venezuela, au Brésil, au Royaume-Uni, en Espagne, en France et aux États-Unis ont été particulièrement débattues. De manière générale, cette discussion a permis de mieux appréhender la dynamique internationale de la lutte des classes – et notamment de repérer les tendances communes aux différents pays. Elle fut aussi l’occasion de réaffirmer la solidarité active de la TMI avec les masses révolutionnaires du Venezuela, qui depuis quatre mois font face à une violente offensive de l’opposition réactionnaire.
La révolution russe de 1917 a occupé les quatre jours suivants de l’École. Les différentes étapes de la révolution ont été distribuées en cinq réunions : la révolution de Février, la période qui va de février à octobre, l’insurrection d’Octobre, l’An un de la révolution, la guerre civile (1918-1921). Les autres réunions étaient plus thématiques, abordant la révolution russe sous différents aspects : la question nationale, l’émancipation des femmes, la Première Guerre mondiale, la question de l’État, le parti bolchevique, la IIIe Internationale et, enfin, les mythes sur 1917. Bien sûr, la dégénérescence bureaucratique de la révolution russe, à partir du milieu des années 20, a été régulièrement abordée.
Pour nous, l’étude approfondie de cette révolution – et de l’histoire en général – n’est pas un exercice académique. Il s’agit d’y puiser des leçons pour notre activité actuelle et à venir. À première vue, cette idée peut surprendre. Que peut-on apprendre d’utile dans l’étude d’une révolution qui s’est déroulée il y a un siècle? Les dirigeants et théoriciens réformistes répondent : « pas grand-chose », voire rien du tout. Au mieux, ils rendent un hommage distant à 1917 ; au pire, ils répètent les mensonges et calomnies des historiens bourgeois. Dans tous les cas, « les temps ont changé », expliquent-ils. Pourtant, comme en 1917, nous vivons toujours, un siècle plus tard, sous le capitalisme en crise. C’est tout de même un point commun qui mérite réflexion!
En réalité, 1917 se distingue par la très grande richesse de son contenu politique – et par ce fait singulier et décisif que les masses révolutionnaires l’ont emporté, ont renversé les classes dirigeantes et ont pris le pouvoir. Avant et après 1917, combien de révolutions, à travers le monde, ont été vaincues – et souvent noyées dans le sang par la réaction? Des dizaines. Elles comportent aussi de précieuses leçons, bien sûr. Mais ce qui fait la singularité et l’importance de la révolution russe, c’est qu’elle démontre positivement, dans le cadre d’une victoire, ce que bien d’autres révolutions soulignent négativement, sur fond de défaite. Et 1917 démontre en premier lieu, d’une façon positive et irréfutable, le rôle déterminant du « facteur subjectif », c’est-à-dire du parti révolutionnaire. Sans le parti bolchevique, et même sans le rôle de Lénine dans ce parti, la révolution russe aurait été battue. L’étude approfondie de la politique menée par le parti bolchevique à partir du retour de Lénine en Russie, début avril 1917, présente donc un énorme intérêt théorique. Le programme, les mots d’ordre et la tactique du parti bolchevique, aux différentes étapes de la révolution, constituent l’un des trésors du marxisme. La dégénérescence ultérieure de la révolution – déterminée par son isolement international et par l’arriération matérielle et culturelle de la Russie – n’enlève rien à l’importance des leçons politiques délivrées par les bolcheviks en 1917. Voilà pourquoi il faut étudier la révolution russe. Pour ceux qui veulent s’y mettre (ou s’y remettre), nos camarades de France et de Belgique viennent de publier un livre sur 1917, maintenant disponible au Québec.
Le dernier jour de l’École mondiale fut consacré au « Rapport international », c’est-à-dire au travail des différentes sections nationales de la TMI, à leurs progrès et leurs projets. Active dans une trentaine de pays, la TMI progresse partout, bien qu’à des rythmes différents selon les pays. Ces progrès sont essentiellement liés à deux facteurs : une attitude sérieuse à l’égard de la théorie, d’une part, et d’autre part une orientation vers les couches les plus radicalisées de la jeunesse, que le capitalisme en crise prive d’un avenir digne de ce nom. La TMI est encore une organisation de taille modeste, mais elle compte un nombre croissant de jeunes cadres déterminés, comme l’a démontré la collecte internationale, qui cette année a encore battu un record.
L’École mondiale s’est clôturée sur une soirée festive au cours de laquelle des chants révolutionnaires furent entonnés dans différentes langues, tard dans la nuit. Mention honorable aux camarades francophones – belges, suisses, français et québécois – qui ont interprété Zimmerwald avec un enthousiasme tel que les imperfections techniques passèrent quasiment inaperçues! Puis, au petit matin blême, les délégations se sont séparées en se donnant rendez-vous en juillet 2018, pour le Congrès mondial de la TMI.