Le 6 août dernier, les travailleurs et les patrons de l’usine automobile Ssangyong, en Corée du Sud, ont signé un accord entérinant le licenciement de 52 % de travailleurs et la mise au chômage technique, sans indemnité, des 48 % restant. C’est sur cette défaite que s’est achevée une grève avec occupation de 77 jours. Aussitôt l’accord signé, le dirigeant syndical Lee Changguen et une centaine de travailleurs ont été arrêtés par la police. A ce jour, 68 travailleurs sont encore incarcérés.
L’un des travailleurs licenciés a tenté de se suicider, après une fouille policière particulièrement brutale, le 20 août. Pendant la grève, six travailleurs ou membres de leur famille sont morts.
Cynisme du gouvernement
A l’origine de cette grève, il y a une manœuvre cynique du gouvernement coréen. Le trust automobile de Shanghai, en Chine, avait pris possession de Ssangyong, il y a plusieurs années. La maison mère, Daewoo, avait fait faillite et voulait le vendre. Le gouvernement coréen et les banques créditrices ont vendu l’usine aux spéculateurs les plus offrants. C’était leur unique critère.
Résultat : 4 ans après le rachat de l’usine, Shanghai a licencié environ 2000 travailleurs, sans concevoir une seule nouvelle automobile. Les nouveaux patrons ne s’intéressaient pas à rétablir un fonctionnement normal, à Ssangyong. Ils voulaient seulement s’emparer des savoir-faire techniques. Finalement, Shanghai a refusé d’administrer Ssangyong, en janvier 2009. Et la mise sous tutelle juridique de Ssangyong a suivi, en février.
Les dirigeants de Ssangyong ont publié un plan de restructuration qui envisageait le licenciement de 2646 travailleurs (soit 37% des effectifs), le 8 avril 2009. Le syndicat des travailleurs de Ssangyong a exigé que l’emploi de tous soit garanti par la division du travail, la conception d’un nouveau véhicule et une aide financière exceptionnelle de la Banque pour le Développement Coréen. Mais ces propositions n’ont même pas été prises en considération. Lorsque Shanghai a abandonné l’administration de l’usine, les travailleurs ont cessé de toucher leur salaire – pendant 5 mois, jusqu’en mai.
Violences policières et provocateurs
Le 8 mai, les dirigeants de Ssangyong ont annoncé, sans consultation, un nouveau plan de licenciement, qui prévoyait le départ de 2405 travailleurs. Le 21 mai, les salariés de l’usine se sont mis en grève. Le syndicat exigeait que le gouvernement coréen prenne le contrôle de l’usine et y injecte des fonds publics. Mais le gouvernement rejeta tout net cette proposition.
Les travailleurs ont alors occupé leur usine et se sont enfermés à l’intérieur. Au bout d’un mois, les dirigeants de Ssangyong ont coupé l’eau, le gaz et l’électricité aux travailleurs. A partir du 20 juin, ils ont même bloqué l’accès au site à toute équipe médicale.
La violence policière a atteint des sommets. Des policiers anti-émeute ont effectué des tirs de TASER sur le visage de travailleurs. Des liquides lacrymogènes ont été déversés par hélicoptère sur les travailleurs. De nombreux travailleurs ont été blessés. Le pied d’un diabétique a subi un début de gangrène, l’équipe médicale et les médicaments ne pouvaient pas entrer dans l’usine.
La majorité des médias ont uniquement mis l’accent sur les scènes de travailleurs résistant à la police à l’aide de lance-pierres et de cocktails molotov. Par contre, ils ont passé sous silence le fait que les patrons ont mobilisé des provocateurs à leur solde. Et personne, parmi les policiers ou les provocateurs, n’a été jugé.
Les travailleurs font face à la plus grande vague d’arrestations depuis le grand mouvement social de 1997. En outre, la police a été jusqu’à poursuivre en justice les travailleurs pour leur faire payer des dommages et intérêts, à hauteur de 307 000 euros.
La répression des travailleurs de Ssangyong doit être condamnée par le mouvement ouvrier de tous les pays. Ils ont mené une lutte héroïque pour sauvegarder leurs emplois et l’outil industriel. Leur défaite doit nous servir d’avertissement : dans sa soif de profits, la classe dirigeante est prête à recourir à la violence et au meurtre. Mais nous vengerons nos camarades !