Les libéraux ont encore utilisé le Conseil canadien des relations industrielles (CCRI) pour écraser une grève. Après quatre semaines de grève, les postiers ont commencé à retourner au travail. La direction du syndicat a accepté l’ordonnance du CCRI et appelé ses troupes à battre en retraite.
Les travailleurs des postes luttaient contre « l’Amazonification » de leurs conditions de travail : la direction de Postes Canada essaie d’aligner leurs conditions de travail sur celles des travailleurs des services de livraison privés qui font affaire avec Amazon. Ces « entrepreneurs indépendants » vivent de l’économie des petits boulots, sans contrat et sans protection.
Les postiers vivaient donc cette grève comme une lutte existentielle.
Une humeur combative
Pas étonnant alors qu’il régnait une humeur combative sur les piquets de grève. Dès les débuts de la grève, les travailleurs discutaient de la possibilité de défier une éventuelle loi de retour au travail. Plusieurs dirigeants syndicaux locaux soulevaient même cette possibilité.
Quand le ministre du Travail a annoncé qu’il demandait au CCRI de casser la grève, la réaction de plusieurs locaux syndicaux a été de se préparer à désobéir.
C’est ce qui s’est vu par exemple à Saskatoon et Burnaby, où des votes de désobéissance ont été adoptés. Le syndicat local d’Edmonton a voté à 68% en faveur de désobéir à l’ordonnance de retour au travail.
Hier, à la manifestation devant le bureau de Chrystia Freeland, on pouvait entendre des postiers crier « Grève générale! Grève générale! ». Le dirigeant local de Scarborough, dans son discours, a appelé à organiser la désobéissance.
Selon certaines informations parcellaires que nous avons entendues, certains locaux syndicaux dans les Maritimes ont même refusé de retourner au travail pendant quelques heures ce matin.
Aujourd’hui, un « piquet solidaire » organisé par des travailleurs d’autres syndicats bloque un centre de tri en Colombie-Britannique. Si la tactique d’organiser un piquet de l’extérieur sans la participation des travailleurs concernés est en soi douteuse, les travailleurs étaient généralement heureux de cette mobilisation, ce qui souligne à nouveau l’humeur combative qui régnait.
Un appel de la direction à désobéir à la loi aurait certainement canalisé cette humeur de désobéissance et mis le feu aux poudres. Les conditions étaient propices pour une grève contre l’ordonnance du CCRI.
Échec de la direction
Mais la direction du syndicat n’a pas organisé cette humeur. Au contraire, elle a tout fait pour l’étouffer.
En échange du retour au travail, Postes Canada a concédé une augmentation salariale de 5% rétroactive sur un an… ce qui faisait déjà partie de la première offre de Postes Canada.
Comme d’habitude, la direction syndicale a promis de contester devant les tribunaux, une stratégie perdante.
Dans son message aux membres envoyé le lundi 16 et ironiquement intitulé « La lutte se poursuit… », la direction affirme que « Nous sommes conscients que les membres souhaitent maintenir les piquets de grève jusqu’à la dernière minute pour exprimer leur dégoût face à la situation. »
Ces paroles trahissent qu’ils voyaient bien que cette humeur combative existait. Mais ils n’y ont rien compris. Les membres n’étaient pas sur les piquets pour « exprimer » leurs émotions, mais pour gagner!
Pire encore : au centre de tri bloqué à Vancouver, des travailleurs affiliés à l’ILWU étaient présents pour aider, et l’exécutif national du STTP a contacté le Congrès du travail du Canada pour qu’ils demandent à leurs affiliés de l’ILWU de cesser le piquetage solidaire! Cette action scandaleuse démontre que l’exécutif tente d’étouffer toute opposition à leur capitulation.
La colère est palpable. Un travailleur du centre a dit à un membre du Parti communiste révolutionnaire présent au piquet : « L’exécutif national ne nous a même pas demandé si nous voulions défier la loi. Il aurait dû procéder à un vote, et non nous forcer à retourner au travail. »
Une autre a même été plus loin : « Les membres de l’exécutif national devraient tous démissionner. S’ils étaient intelligents et voulaient s’épargner une humiliation lors de la prochaine convention, ils démissionneraient tous. »
Casser la dynamique
Il s’agit d’une énorme occasion manquée.
Dans les dernières années, le patronat a repris un à un les gains faits par les travailleurs au fil du temps en attaquant leurs salaires et conditions de travail. Et dès que les travailleurs entrent en grève pour se défendre, les gouvernements se tiennent prêts à utiliser la loi pour forcer le retour au travail. C’est ce qui est arrivé aux débardeurs, aux cheminots, aux pilotes, et aussi aux postiers en 2018.
La situation était idéale pour enfin stopper cette dynamique. Comme l’a dit un autre travailleur à un établissement de distribution de Vancouver à un camarade du PCR, « On pense à Jean-Claude Parrot [ancien dirigeant du STTP], on parle encore de lui et de ce qu’il a fait. Il est une légende. Et c’est à cause qu’il a défié les lois de retour au travail. Nous avions la chance de changer l’histoire du mouvement ouvrier, mais nous l’avons gaspillée ».
L’ordonnance ne règle absolument rien, et avait uniquement comme but de casser la dynamique de la grève et de permettre le magasinage de Noël. Elle ne met aucunement fin à la volonté de Postes Canada de décimer les conditions de travail des postiers.
Le retour au travail est imposé jusqu’au 22 mai 2025. D’ici là, l’humeur combative des membres de la base du syndicat doit être organisée. Il faut une direction syndicale qui reflète la volonté de lutter des membres et qui soit prête à mener la lutte jusqu’à la victoire en défiant les lois faites pour briser le mouvement.
Ultimement, pour mettre fin aux attaques de la direction, Postes Canada doit être placée sous le contrôle démocratique des travailleurs. Autrement, les patrons qui le contrôlent vont continuer à essayer d’en maximiser les profits au détriment des travailleurs.
Plus que cela, c’est toute l’industrie de la livraison et de la logistique qui doit être expropriée des mains avares des capitalistes, et être gérée pour satisfaire les besoins des gens plutôt que la soif de profits des patrons.
Nous appelons quiconque souhaite faire revivre les traditions combatives du STTP et lutter pour une perspective révolutionnaire dans le mouvement ouvrier à rejoindre les communistes du STTP, et à rejoindre le PCR.
Les communistes du STTP organisent une réunion d’urgence ce samedi à 20h heure de l’Est pour discuter de comment poursuivre la lutte. C’est à nous de casser la dynamique où les patrons attaquent notre droit de grève et la direction syndicale flanche. Rejoignez-nous!