Le nom de la rose (1986) est une puissante polémique contre l’obscurantisme religieux et pour la raison. Mais pour nous, communistes, ce film, basé sur le roman d’Umberto Ecco du même nom, est aussi une attaque contre l’idéalisme philosophique et un plaidoyer en faveur du matérialisme.

L’intrigue du film de Jean-Jacques Annaud prend la forme d’une enquête sur une série de morts mystérieuses dans une abbaye bénédictine en Italie au XIVe siècle. Les morts surviennent alors qu’un important congrès théologique doit s’y réunir entre Franciscains et représentants du pape. Un des représentants franciscains, le frère Guillaume de Baskerville (Sean Connery), ainsi que son jeune protégé Adso de Melk (Christian Slater), partent en enquête. 

Les dirigeants de l’abbaye insistent pour dire que ces morts doivent être l’œuvre du diable. Baskerville, un érudit adepte d’Aristote, considère plutôt qu’il faut chercher les causes dans le monde matériel à l’aide de la raison avant de recourir au surnaturel.

Pendant que l’enquête progresse, les délégués franciscains et les représentants du pape arrivent pour leur débat. Les Franciscains, qui ont fait vœu de pauvreté, s’insurgent contre l’opulence grossière de l’Église. Ils défendent la position que le Christ lui-même était pauvre. Le représentant du pape, engoncé dans ses habits flamboyants, affirme que le débat « n’est pas si le Christ lui-même était pauvre, mais si l’Église devrait l’être ». Inutile de dire qu’il n’a aucunement l’intention d’abandonner ses richesses obscènes au nom de principes religieux. 

La source de toutes ces richesses est bien montrée, quand on voit les paysans pauvres faire la file pour remettre leurs offrandes. Est frappant le contraste entre les extravagantes dorures dont sont parés l’abbaye et le haut clergé, et la misère abjecte des paysans. 

Quand un représentant de l’Inquisition arrive, il trouve rapidement trois boucs émissaires faciles comme source de l’infiltration diabolique : une femme, un bossu faible d’esprit, et un ancien Dolcinien. Les Dolciniens étaient une secte radicale appelant à revenir aux racines communistes primitives du christianisme, considérée comme hérétique. Tout le clergé, sauf Baskerville et son protégé, se rangent derrière cette explication idéaliste.

Mais Baskerville découvre pourquoi les hauts dirigeants de l’abbaye s’accrochaient autant à ces superstitions : ils préfèrent cela à la découverte de la vérité. Cette abbaye bénédictine possède une riche bibliothèque, et ses moines s’adonnent à la préservation et la retranscription de textes anciens, ainsi qu’à leur traduction. La découverte d’un texte ancien se trouve derrière les meurtres. Certains hauts placés dans l’abbaye le considèrent comme dangereux pour l’Église catholique et sont prêts à tout pour empêcher qu’il soit traduit et diffusé. 

Le nom de la rose nous invite à nous méfier de ceux qui rejettent la raison et tentent d’obscurcir la réalité par des explications idéalistes. La raison et la recherche d’une explication objective aux phénomènes dans le monde matériel sont dangereux pour les riches et puissants, parce qu’elles permettent de mettre en lumière leurs crimes. L’influence de l’Église est grandement diminuée aujourd’hui. Mais c’est la philosophie postmoderne, qui elle aussi nie la possibilité de faire de la science et de comprendre objectivement le monde, qui domine la vie intellectuelle. Qui a peur de la raison?