Photo : University de Waterloo

Le 28 juin dernier, un homme armé d’un couteau a fait irruption dans un cours de Philosophie du genre à l’Université de Waterloo, et a poignardé la professeure ainsi que deux étudiants. Cette attaque clairement motivée par la haine survient après des mois d’une campagne délirante dans les médias par laquelle les politiciens et commentateurs de droite tentent de fomenter la haine des personnes trans.

Selon les témoins, l’attaquant, un étudiant de l’Université, serait entré dans la classe pendant le cours, aurait demandé à la professeure de quel cours il s’agissait, et n’aurait sorti son couteau qu’après qu’elle ait confirmé qu’il s’agissait d’un cours de Philosophie du genre. Il aurait ensuite levé son couteau et se serait jeté sur la professeure qui s’enfuyait, poignardant deux étudiants et tentant d’en poignarder un troisième dans la mêlée. Heureusement, malgré leurs blessures graves, on ne craint pour la vie d’aucune des victimes. 


Des amis de l’attaquant, interrogés par un journaliste de Global News, ont affirmé qu’il s’était souvent exprimé contre la communauté LGBT et contre la tenue d’événements de la Fierté à l’Université de Waterloo.

Offensive de droite

Depuis quelques temps, la droite au pays s’est lancée dans une campagne de haine visant les personnes trans. On peut lire dans les journaux un barrage d’articles complètement déments sur « l’idéologie du genre », le « wokisme », « l’hypersexualisation des enfants », les drags queens et autres épouvantails utilisés pour semer la crainte des personnes trans et LGBT en général. Des médias québécois ont même relayé la fausse nouvelle complètement débile selon laquelle des enfants britanniques « s’identifieraient » commes des chats.

La droite canadienne prend ici exemple sur le Royaume-Uni et les États-Unis, où une vague de lois discriminatoires envers les personnes trans ont été adoptées. 

Tout cela fait partie d’une offensive générale de la classe dirigeante contre les acquis des luttes passées des opprimés. Aux États-Unis, la Cour suprême a pris une série de décisions renversant des droits protégés, notamment le droit à l’avortement et celui de ne pas être discriminé sur la base de son orientation sexuelle par des commerçants. Au Nouveau-Brunswick, le gouvernement conservateur de Blaine Higgs a mis fin à la Politique 713, qui protégeait les enfants LGBT dans les écoles publiques.

Cette offensive politique et médiatique a mené à un enhardissement de l’extrême droite, qui tient par exemple souvent des manifestations devant des événements de drags queens, dont certains qui ont dû être annulés en raison de menaces. Une manifestation anti-LGBT est organisée à Québec par des néo-nazis et complotistes le 8 juillet. Selon Statistique Canada, le pays a connu une hausse des crimes haineux sur la base de l’orientation sexuelle de 64% entre 2020 et 2021.

Il y a deux semaines, nous écrivions : « L’extrême droite a propagé le mythe complet et absolu selon lequel les femmes trans et les drag queens sont souvent des pédophiles et que le véritable objectif [des contes drag] est de “préparer” les enfants à des abus sexuels. On ne saurait trop insister sur la dangerosité de telles calomnies. Elles exposent directement les personnes LGBTQ+ à des risques de violence. » Une semaine plus tard, l’attaque à l’Université de Waterloo confirme tristement nos propos.

Boucs émissaires

Si certains, comme les chroniqueurs du Journal de Montréal, n’ont même pas eu la décence de mettre en pause leur campagne anti-trans pour quelques jours, la classe politique canadienne a réagit avec des larmes de crocodiles, comme à son habitude. En réaction à l’attentat, les politiciens – à l’exception notable du chef conservateur Pierre Poilievre, qui comprend très bien que sa base est probablement largement sympathique à cette attaque – ont Tweeté quelques platitudes. 

Le premier ministre Justin Trudeau a affirmé que « cette violence abjecte et la haine qui l’a alimentée n’ont pas leur place dans notre pays ». Le premier ministre ontarien Doug Ford a prétendu « prier pour le rétablissement des victimes », sans mentionner le caractère haineux de l’attaque. Le chef du NPD Jagmeet Singh a dit que « les femmes et la communauté 2SLGBTQIA+ méritent la sécurité ».

Mais ces mots sont largement vides venant de gens qui défendent activement le système qui encourage et nourrit la haine et la violence transphobes et homophobes. 

Car ce n’est pas un hasard si la droite s’est lancée dans une offensive contre les personnes trans et « l’idéologie du genre ». Le contexte actuel de crise profonde du capitalisme, de faillite complète du système, force la classe dirigeante à trouver des boucs émissaires. 

Alors que les travailleurs souffrent d’une grave pénurie de logement abordables, d’une explosion du coût de la vie, de services publics en décrépitude, etc., l’épouvantail des personnes trans et des drags queens endoctrinant soi-disant les enfants pour mieux les abuser sert de diversion. 

Cela est très utile à la bourgeoisie et ses politiciens pour faire oublier leur incapacité complète à offrir la moindre solution aux problèmes réels et urgents des travailleurs. 

Les fanatiques violents comme celui de l’Université de Waterloo ne font que pousser la rhétorique haineuse des politiciens et commentateurs à leur conclusion logique. La violence contre les minorités opprimées n’est pas une anomalie, mais une caractéristique du capitalisme.

Et les politiciens libéraux comme Trudeau ne représentent que l’autre côté de la médaille dans cette mascarade. À des fins complètement opportunistes, ils agitent le drapeau arc-en-ciel et se présentent comme les champions des femmes, des personnes LGBT et des autres minorités opprimées – tout en ne faisant rien en pratique pour les protéger.

La violence vient de la droite

Cette attaque n’est que le plus récent exemple de violence de la droite, à une époque où tragédies et horreurs surviennent de plus en plus régulièrement. Dans un système en crise totale, le vieux statu quo stérile ne tient plus la route. Plus grand monde n’y croit. C’est sur ce terreau fertile que l’extrême droite gagne en popularité. Les boucs émissaires qu’elle offre (femmes, personnes trans, immigrants, etc.) orientent la colère vers des canaux sûrs pour le système.

Face à cette menace de l’extrême droite, certains à gauche se laissent démoraliser. Nous ne pouvons laisser ces sentiments nous gagner. Car c’est exactement le but de ces attaques. Ce genre d’attaque sert à terroriser la gauche, pour la désorganiser et la forcer à se taire et à se cacher. 

Mais le terreau de la crise du capitalisme est encore plus fertile pour les sentiments d’extrême gauche. Particulièrement chez la jeunesse, la popularité du socialisme et du communisme grandissent. Il ne s’agit pas d’une montée de l’extrême droite, mais d’une polarisation vers la droite et la gauche.

Contre la violence de la droite, il faut organiser la force sociale capable d’éclipser les nabots xénophobes de l’extrême droite : la classe ouvrière. En pointant du doigt les vrais responsables de la misère et de l’effondrement social – les capitalistes – nous pourrons unir toutes les couches de la classe ouvrière dans un mouvement de masse pour la transformation socialiste de la société. Seul un tel mouvement peut non seulement écraser l’extrême droite, mais aussi le système pourri qu’elle défend et qui nourrit les sentiments rétrogrades et haineux.