Le variant Omicron : une menace engendrée par le capitalisme

Un nouveau variant inquiétant de la COVID-19 est apparu, appelé B.1.1.529 ou Omicron. Cette souche est le résultat inévitable de la course effrénée aux profits à court terme des capitalistes, qui font perdurer ce cauchemar pandémique interminable.

  • Joe Attard
  • mar. 30 nov. 2021
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Image : Pixabay

Un nouveau variant inquiétant de la COVID-19 est apparu, appelé B.1.1.529 ou Omicron. Cette souche est le résultat inévitable de la course effrénée aux profits à court terme des capitalistes, qui font perdurer ce cauchemar pandémique interminable.

Le variant Omicron a été détecté pour la première fois en Afrique du Sud, où il a rapidement supplanté le variant Delta, autrefois dominant dans le Gauteng. La moyenne nationale officielle des cas sur sept jours est passée d’environ 300 à plus de 4000 fin novembre. Omicron a déjà commencé à se propager dans le monde, avec des cas détectés en Italie, en Allemagne, au Royaume-Uni, en Israël, à Hong Kong et au Danemark.

Comme cela a été le cas tout au long de la pandémie de COVID-19, cette situation était entièrement évitable. Si un plan rationnel mondial avait été mis en place, nous aurions pu avoir déjà mis fin à la pandémie. Neuf milliards de doses de vaccin ont déjà été fabriquées, et 12 milliards sont attendues d’ici la fin de l’année : de quoi vacciner tous les habitants de la planète.

Mais alors que plus de 60% des habitants de la plupart des pays occidentaux ont reçu plusieurs doses, ce chiffre tombe à 3% dans les pays à faible revenu. Ce chiffre désolant est entièrement dû à la chasse au profit des grandes entreprises pharmaceutiques, qu’elles font passer avant la protection de la vie humaine, et au protectionnisme vaccinal des pays riches. Cela a créé des conditions idéales pour le développement de nouvelles souches de virus plus contagieuses et plus résistantes. Comme nous l’avons écrit en mars :

« En accumulant et en se disputant les vaccins dans une course à la vaccination de leur propre population, les pays les plus riches mettent en danger d’innombrables vies… Pendant ce temps, le virus continue de circuler et de muter dans les pays plus pauvres, au risque de voir apparaître de nouvelles souches plus transmissibles et plus mortelles. »

Les capitalistes du secteur pharmaceutique et les nations impérialistes ont abandonné les pays les plus pauvres à leur sort. Des milliards de personnes se sont retrouvées sans défense contre le virus, après des décennies d’étranglement économique qui ont laissé les infrastructures sanitaires et sociales de leurs pays en lambeaux. Aujourd’hui, le monde entier pourrait être sur le point de payer le prix fort pour la politique impitoyable et délibérée des impérialistes consistant à donner la priorité à leurs reprises économiques respectives, précisément au moment où la coopération internationale est la plus nécessaire.

On récolte ce que l’on sème

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a annoncé que le variant Omicron représente un « risque très élevé » pour la lutte mondiale contre la COVID-19, et pourrait entraîner de « graves conséquences », sous la forme de nouvelles poussées d’infections dans le monde entier. Pas moins de 15 millions de personnes sont mortes des suites de la pandémie, directement et indirectement. De nouvelles vagues de cas feront encore grimper ce bilan.

Bien que les données réelles sur Omicron soient encore limitées, on sait que le variant contient un nombre record de 32 mutations de la protéine S utilisée pour pénétrer dans les cellules humaines. Selon les données disponibles en Afrique du Sud, ce variant pourrait être de 100 à 500% plus transmissible que le Delta, et les scientifiques craignent qu’il puisse échapper à l’immunité conférée par la vaccination.

Cela a conduit l’OMS à classer Omicron dans la catégorie « Variant préoccupant », soit la catégorie la plus grave. En réaction, des dizaines de pays ont imposé des interdictions aux visiteurs en provenance du sud de l’Afrique. Cela revient à fermer la porte de la grange après que le cheval se soit enfui. Omicron est arrivé. Ce que nous ignorons encore, c’est sa virulence, c’est-à-dire sa capacité à provoquer des symptômes graves, et la résistance des vaccins actuels. Mais nous pouvons être raisonnablement sûrs que, dans les pays pauvres qui dépendent largement de l’immunité « naturelle », il fera des ravages.

Ce n’est pas un hasard si cette souche est apparue en Afrique du Sud, où le taux de vaccination national officiel est d’à peine 27%, et bien plus faible dans les populations rurales.

Il s’agit en fait de l’un des taux de vaccination les plus élevés du continent, et le gouvernement sud-africain affirme disposer de suffisamment de vaccins pour les cinq prochains mois. Le problème est que bon nombre de ces vaccins sont des doses données dont la date de péremption est proche, ce qui signifie que la fenêtre pour les administrer est étroite. Si l’on ajoute à cela le manque de chambres froides, des infrastructures inadéquates et des maillons manquants dans la chaîne d’approvisionnement (notamment les seringues), il est difficile d’intensifier le déploiement. Si l’Afrique du Sud n’avait pas été privée de vaccins dès le départ, elle ne serait pas dans cette situation.

Toutes les souches de coronavirus précédemment dominantes sont apparues dans des pays (par exemple, la Grande-Bretagne, l’Inde, le Brésil) où de grandes populations non vaccinées ont pu se côtoyer pendant de longues périodes – soit en raison des stratégies d’« immunité collective » poursuivies par les politiciens de droite pour éviter la fermeture de leurs économies, soit en raison du faible accès aux vaccins, soit les deux.

Compte tenu du faible taux de vaccination qui persiste dans de grandes parties du monde, une souche comme Omicron était tout à fait prévisible. Comme nous l’avons expliqué précédemment, le fait de laisser circuler librement de « vieilles » souches du virus l’encourage à s’adapter et à surmonter l’immunité conférée par les infections et les vaccinations précédentes, qui entraînent toutes deux l’organisme à repérer la protéine S du coronavirus et à y résister :

« La façon d’empêcher l’apparition de nouveaux variants qui tuent beaucoup plus de gens est d’arrêter la sélection naturelle. Le moyen le plus simple de stopper l’évolution est de maintenir la taille des populations à un bas niveau. […] Politiquement, cela signifie qu’il faut donner la priorité à la réduction de la propagation du virus plutôt qu’aux profits des entreprises. C’est un choix que les politiciens capitalistes ne sont tout simplement pas prêts à faire. »

Si Omicron est une mauvaise nouvelle pour l’humanité, c’est une très bonne nouvelle pour les capitalistes du secteur pharmaceutique, qui sont heureux de continuer à profiter de la pandémie aussi longtemps qu’ils le peuvent, sans se soucier du chaos et des pertes humaines qui en résultent :

« Dans leurs communiqués aux investisseurs, ces sociétés affirment prévoir réaliser de gros profits en développant des doses de rappel pour réagir aux nouveaux variants. Il n’est pas dans leur intérêt financier d’éradiquer le virus. On peut se représenter ici une version tout à fait moderne de la théorie d’évolution, avec l’établissement d’une relation symbiotique entre le SRAS-CoV-2 et les investisseurs en biotechnologie, tous deux unis dans leur parasitisme du corps des travailleurs. »

Pfizer, BioNTech et Moderna réalisent actuellement 1000 dollars de profits par seconde, le premier s’apprêtant à engranger 36 milliards de dollars de ventes de vaccins d’ici à la fin 2021. Ces superprofits sont le résultat de ventes directes aux pays les plus riches, qui peuvent se permettre d’acheter des doses en gros, et qui réclament actuellement des vaccins mis à jour et des doses de rappel. Lorsque la nouvelle du variant Omicron s’est répandue, les actions des sociétés pharmaceutiques ont grimpé dans les bourses du monde entier. Il est difficile d’imaginer une expression plus éloquente de la maladie du capitalisme.

Pendant ce temps, les capitalistes des grandes entreprises pharmaceutiques continuent de s’opposer farouchement à toute tentative de leur arracher les droits de propriété intellectuelle sur les vaccins pour la COVID-19. Et ce, malgré le fait que la majorité de la recherche sur ces vaccins a été menée par l’État, avec des fonds publics. Ces pirates utilisent simplement leur puissance financière et leur contrôle sur les moyens de production médicale pour obtenir des brevets sur ces médicaments qui sauvent des vies, et prélever les profits.

Il y a un an, des délégués d’Afrique du Sud et d’Inde ont demandé à l’Organisation mondiale du commerce de renoncer à la protection par brevet des vaccins pour la COVID-19, afin que des dérivés bon marché puissent être produits localement dans les pays pauvres. Cet appel a été immédiatement rejeté par un certain nombre de membres impérialistes de l’OMC, dont les États-Unis, l’Union européenne et le Royaume-Uni, à la demande de leurs capitalistes pharmaceutiques respectifs, qui dépensent des millions chaque année en efforts de lobbying.

Bien que le président américain Joe Biden se soit depuis lors déclaré théoriquement en faveur de la levée des brevets (une fois l’approvisionnement en vaccins des États-Unis ayant été garantie), les impérialistes n’ont précisément rien fait pour changer quoi que ce soit. Au contraire, l’Allemagne en particulier reste fermement opposée à la levée des brevets sur les vaccins, arguant que « la propriété intellectuelle est une source d’innovation et doit le rester à l’avenir ». En bref, l’institution de la propriété privée ne peut être sapée, même dans la plus grave des crises.

La cupidité des pays riches en matière de vaccins les a poussés à monopoliser 87% de l’offre mondiale. Les bourgeois occidentaux se sont tous précipités pour stocker des doses – se chamaillant entre eux au passage – dans une course à la réouverture de leurs économies et à la réalisation de profits plus rapidement que leurs concurrents.

On pourrait penser que la pandémie de COVID-19, qui représente une menace existentielle pour l’ensemble du système capitaliste, convaincrait les soi-disant dirigeants du monde de mettre de côté leurs intérêts nationaux immédiats en faveur d’un front uni contre un ennemi commun. Au lieu de cela, ils se sont empressés d’accumuler des doses au point d’en posséder quatre ou cinq fois plus que ce dont leur population entière a besoin.

Malgré les avertissements répétés des autorités scientifiques selon lesquels le protectionnisme vaccinal mettrait en danger à long terme leurs propres populations et leur reprise économique, ils n’ont offert aux nations plus pauvres que des banalités et des larmes de crocodile.

Les doses de rappel sont en train d’être distribuées à tous les adultes dans des pays comme la Grande-Bretagne. Entre-temps, seuls 25% des habitants du Zimbabwe et 14% de ceux de la Namibie ont reçu leur première dose. Et comme la demande avait auparavant chuté en raison des taux de vaccination élevés, les pays riches ont écoulé des millions de doses qui approchaient de leur date de péremption.

Le British Medical Journal a relevé que les États-Unis avaient déjà jeté plus de 180 000 doses de vaccin à la fin du mois de mars. Dans le monde entier, 241 millions de doses pourraient être jetées à la poubelle, car il n’y a pas d’incitation immédiate à les expédier à l’étranger avant leur expiration. Seule l’anarchie du marché pourrait produire une contradiction aussi scandaleuse!

Un sommet du G7 présidé par le président Biden en septembre a fixé comme objectif d’aider les 92 pays les plus pauvres à atteindre un taux de vaccination de 40% d’ici la fin de l’année. Ces promesses sont parties en fumée presque immédiatement. Le G7 est loin d’avoir atteint son objectif, qui était de toute façon beaucoup trop limité. Les États-Unis n’ont atteint que 25% de leur promesse, l’Union européenne 19% et le Royaume-Uni 11%. Tout cela signifie que COVAX, l’initiative de l’OMS mise en place pour acheminer des vaccins vers les pays pauvres, n’a atteint que les deux tiers de son objectif de 2 milliards de vaccins pour 2021.

Pour couronner le tout, il y a eu un flux massif de vaccins sortant des pays qui en ont le plus besoin. Par exemple, des millions de doses du vaccin à dose unique de Johnson & Johnson fabriqué en Afrique du Sud – essentiel aux efforts de vaccination du pays après la suspension de celui d’AstraZeneca – ont été exportées l’année dernière pour répondre aux commandes des riches pays européens. Ainsi, non seulement les escrocs impérialistes ont refusé d’offrir même les vaccins dont ils n’ont pas besoin, mais les capitalistes des grandes entreprises pharmaceutiques continuent d’exploiter les pays africains pour gonfler les stocks occidentaux.

Les conséquences de ces politiques criminelles commencent à se faire sentir chez nous. Il y a quelques semaines à peine, de nombreux pays occidentaux annonçaient fièrement la fin imminente de la pandémie et le retour à la « normalité ». Mais aujourd’hui, alors que le nombre de cas, d’hospitalisations et de décès commence déjà à monter avec l’arrivée de l’hiver, Omicron a remis la perspective de nouveaux confinements dans tous les esprits.

D’importantes manifestations ont éclaté dans plusieurs pays européens contre l’introduction brusque de nouvelles mesures de distanciation sociale et de confinement, associées à la vaccination obligatoire. Ces manifestations, même si elles sont dirigées par des fascistes et des théoriciens du complot, révèlent à quel point la confiance du public dans l’establishment s’est effondrée après deux années au cours desquelles il a manifestement échoué à maîtriser la pandémie.

Que faire?

La myopie et l’exploitation vampirique des pays pauvres par l’impérialisme capitaliste sont les principaux responsables de l’émergence d’Omicron. Cette nouvelle souche est un monstre créé par le système, que tout le monde a vu venir, mais que personne n’a tenté de prévenir. Trotsky a écrit un jour que la classe dirigeante de son époque marchait vers la catastrophe les yeux fermés. Aujourd’hui, elle le fait les yeux ouverts!

Nous affirmions en février que « cette pandémie ne sera vraiment terminée que lorsque la population de la planète entière sera vaccinée ». En fait, il est peut-être déjà trop tard. Le virus pourrait être devenu endémique, comme la grippe saisonnière : un spectre permanent qui plane sur nos vies et avec lequel nous devrons coexister. Ce n’était pas une fatalité, mais une conséquence de la mauvaise gestion capitaliste, imposée aux générations futures.

Le capitalisme ne cesse de prouver qu’il est organiquement incapable de faire face à une crise mondiale de cette ampleur. Toutes les techniques et l’expertise existent pour mettre fin à la pandémie. Mais la propriété privée et l’État-nation sont des obstacles monstrueux qui empêchent de lutter efficacement contre la COVID-19, ce qui nécessiterait une coopération mondiale et le partage ouvert des ressources en fonction des besoins plutôt que du profit.

La seule façon d’assurer un quelconque retour à la normale est de combiner la lutte contre la pandémie avec la lutte pour renverser le système capitaliste pourri, avant qu’il n’entraîne l’humanité encore plus loin dans la barbarie.