Solidarité avec les travailleurs et travailleuses de la construction! Il faut défier la loi spéciale!

Les travailleur-euses de la construction entrent aujourd’hui en grève générale illimitée. Les conventions collectives étant arrivées à échéance le 30 avril, les travailleur-euses de l’Alliance syndicale s’étaient dotés de mandats de grève forts, à 93 %, allant jusqu’à 99% chez les syndiqué-es de la Côte-Nord. L’Alliance syndicale est composée de la FTQ-Construction, du Conseil provincial […]

  • MAB
  • mer. 24 mai 2017
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Les travailleur-euses de la construction entrent aujourd’hui en grève générale illimitée. Les conventions collectives étant arrivées à échéance le 30 avril, les travailleur-euses de l’Alliance syndicale s’étaient dotés de mandats de grève forts, à 93 %, allant jusqu’à 99% chez les syndiqué-es de la Côte-Nord. L’Alliance syndicale est composée de la FTQ-Construction, du Conseil provincial (International), du Syndicat québécois de la construction, de la CSD Construction et de la CSN-Construction, pour un total de 175 000 travailleurs dans les quatre secteurs de la construction (construction résidentielle, génie civil et voirie, industriel, institutionnel et commercial). Le premier ministre Philippe Couillard a ouvertement brandi la menace d’une loi de retour au travail.

Une attaque en règle des patrons

Les conflits de travail dans les secteurs publics comme privés au cours des dernières années ont vu la partie patronale poser des demandes de plus en plus lourdes, et les négociations actuelles ne sont pas une exception.

Le secteur de la construction est le seul au Québec où il n’est pas possible de négocier des clauses qui s’appliqueraient rétroactivement. Ainsi, comme l’explique Michel Trépanier, porte-parole de l’Alliance syndicale, la tactique des patrons a été de faire traîner en longueur les négociations, ce qui permet de retarder l’application de possibles gains des travailleur-euses, en tablant sur l’adoption d’une loi spéciale par la suite. « Nos travailleurs perdent présentement 51 $ par semaine parce qu’il n’y a aucune clause de rétroactivité dans notre industrie », a-t-il indiqué.

Dans les secteurs institutionnel, commercial et industriel (IC/I), les patrons veulent augmenter la flexibilité du travail, c’est-à-dire pouvoir imposer des journées de travail commençant plus tôt, soit à 5h au lieu de 6h, et terminant plus tard, soit à 20h au lieu de 19h. Les travailleur-euses s’opposent à cette attaque contre la conciliation travail-famille.

Sur le plan des salaires, l’offre patronale est tout aussi méprisante. Alors que l’Alliance syndicale demande des hausses de 13% à 17% (avantages sociaux compris) selon le métier pour la durée de la convention, soit quatre ans, les patrons sont prêts à offrir 1,6% par année, soit seulement 6,4% sur quatre ans. Considérant que l’inflation est de 1,6% depuis l’année dernière, cette offre représente simplement une stagnation des salaires.

La grève de 2013

Les dernières négociations collectives de 2013 avaient été le théâtre d’une grève générale. Celle-ci avait été la première depuis 20 ans dans l’industrie. Lors de ces négociations, les patrons voulaient forcer les travailleur-euses à travailler plus et à gagner moins. Ils voulaient entre autres introduire la semaine de 6 jours et la journée de travail de 14 heures, tout en réduisant la prime pour temps supplémentaire, passant de temps double à temps et demi. Il s’agissait alors d’une attaque directe envers les travailleur-euses, et les nouvelles demandes des patrons ne sont qu’une occasion d’en remettre une couche. Après deux semaines de grève, le gouvernement Marois avait adopté une loi spéciale qui imposait le retour au travail des 77 000 syndiqués des secteurs IC/I et prolongeait la convention collective d’un an en imposant les conditions de travail.

Puis, à l’été 2014, quand était venu le temps de renégocier après l’échéance de la loi spéciale péquiste, le ministre du Travail Sam Hamad avait affirmé qu’il était en train de rédiger une loi spéciale, affirmant qu’il n’y aurait pas de conflit de travail « parce que ce n’est pas acceptable ». Le conflit avait pris fin par la signature en juillet 2014 d’une convention collective contenant de maigres hausses salariales de 2,3 % par année en moyenne sur trois ans. De plus, la décision concernant les heures supplémentaires a été laissée à un arbitre, qui a décidé en 2016 d’imposer le temps et demi pour la première heure de temps supplémentaire, qui était auparavant payée à temps double.

Les travailleur-euses ont gardé un souvenir amer de cet épisode. Les votes de grève de cette année, tous au dessus de 90 %, démontrent la colère des travailleur-euses. Comme l’explique le porte-parole de la FTQ-Construction, Daniel Doré, « ça fait environ six ans qu’on ne va rien chercher. C’est toujours l’employeur qui se fie à la loi spéciale et nous sommes les seuls à ne pas avoir de rétroactivité quand la convention est signée. Il sait qu’il y aura une loi spéciale parce que la partie patronale se fie à la loi spéciale. »

Résistons aux attaques des capitalistes!

Considérant que l’industrie de la construction représente 12% du PIB du Québec, l’Association de la construction du Québec (ACQ), qui représente les patrons, souligne qu’une « grève aurait des répercussions négatives sur l’ensemble de l’économie du Québec ». De même, Philippe Couillard a affirmé : « C’est l’économie du Québec qui est en jeu. C’est l’intérêt supérieur du Québec qui est en jeu et je veux juste que tout le monde sache quel est mon cadre d’analyse dans cette situation-là : ce n’est pas est-ce que j’aime mieux les patrons ou les syndicats là. C’est qu’est-ce que ça a comme impact sur notre économie, nos emplois. »

Le gouvernement libéral n’a pas caché ses intentions. Philippe Couillard avait d’abord affirmé la semaine passée qu’il ne resterait pas « les bras croisés devant un ralentissement des activités avec des conséquences économiques importantes sans agir. » Ce matin, il a précisé davantage sa pensée, affirmant qu’il avait l’intention d’adopter une loi spéciale si des progrès ne sont pas réalisés « rapidement » à la table de négociations. Comme l’Assemblée nationale est en relâche parlementaire cette semaine, il faut donc prévoir l’adoption d’une loi de retour au travail dès lundi prochain si une entente de principe n’est pas adoptée.

Il n’y a pas lieu de s’en surprendre. Les libéraux ne peuvent pas plus se permettre un long conflit cette fois qu’ils ne le pouvaient en 2014, considérant que le gouvernement voudra avoir le meilleur résultat économique possible avant les élections qui auront lieu en 2018. De plus, la classe dirigeante québécoise ne veut pas d’une grève à long terme dans une industrie aussi importante pendant la période de l’année lors de laquelle les grands travaux doivent avancer rapidement.

Après les négociations dans le secteur public de 2015, qui se sont soldées par une entente bidon acceptée par les dirigeants syndicaux, c’est maintenant au tour des travailleur-euses du secteur privé de faire face à une dégradation de leurs conditions de travail que les patrons tente d’imposer. Cela n’a rien d’un hasard. L’austérité et la diminution des conditions de travail sont une caractéristique fondamentale de la période actuelle de crise du capitalisme.

Les travailleur-euses en grève feront face à une immense pression provenant des médias bourgeois, des patrons et de leurs alliés. Déjà, on brandit de toutes parts la menace que la grève fait peser sur l’économie. Les patrons, en plus, ont le soutien total de l’État et savent que la loi spéciale pourra mettre fin à la grève.

Les grévistes devraient se préparer à défier la loi spéciale afin de défendre leurs droits syndicaux. Les dernières négociations ont démontré que le gouvernement, qu’il soit péquiste ou libéral, est l’allié fidèle des patrons. Ceux-ci peuvent toujours compter sur leurs amis à l’Assemblée nationale pour criminaliser les grévistes. La loi est toujours au service des puissants, mais elle ne peut rien contre les masses qui refusent d’y obéir.

Les travailleur-euses de la construction devraient apprendre de la dernière grève et rester unis dans les négociations malgré les diverses pressions des patrons qui chercheront à les séparer pour les affaiblir. De plus, tous les syndicats, même s’ils ne sont pas affectés directement, devraient démontrer leur soutien et prévoir des grèves de solidarité.

Toutes les forces anti-austérité devraient se lancer pour aider les travailleur-euses. Québec solidaire devrait ouvertement appuyer les travailleur-euses de la construction et se servir de sa visibilité pour dénoncer le recours à la loi spéciale et appeler tous les travailleur-euses à soutenir les grévistes. Il s’agit d’une occasion en or pour le parti d’exposer les libéraux et le PQ et d’en appeler à la construction d’un parti de la classe ouvrière, distinct des partis des patrons.

Une attaque contre un est une attaque contre tous. Une victoire pour les travailleur-euses de la construction sera une source d’inspiration pour les travailleur-euses des autres secteurs, et contribuera à revitaliser le mouvement ouvrier dans son ensemble.

Victoire aux travailleurs et aux travailleuses de la construction!

Défions la loi spéciale!