Photo : CSN/Facebook

Laval, Québec

par Ariana H.

Depuis l’écriture de cet article, le syndicat a obtenu son accréditation. Mais Amazon n’est pas prêt à laisser ses travailleurs de syndiquer, et dit maintenant vouloir contester la constitutionnalité du Code du travail du Québec pour empêcher la reconnaissance du syndicat.

Malgré les efforts de démoralisation et de casse syndicale de l’entreprise multimilliardaire, les travailleurs d’Amazon à Laval cherchent à rejoindre la Confédération des syndicats nationaux (CSN). Ils font partie d’une vague de travailleurs d’entrepôts d’Amazon qui tentent activement de se syndiquer, de la Colombie-Britannique à New York. En annonçant le vote, la CSN a fait part de son intention d’étendre la campagne. « Nous enjoignons l’ensemble des travailleuses et des travailleurs des autres entrepôts d’Amazon au Québec : il est temps de se tenir debout et de faire valoir ses droits, même devant les géants! »

Depuis, la direction d’Amazon cherche désespérément à sauver la face. Elle a eu recours à des mensonges flagrants pour insister sur le fait qu’elle n’avait aucune idée des raisons pour lesquelles les travailleurs se tournaient vers le syndicat. Récemment, par exemple, Barbara Agrait, porte-parole d’Amazon, a déclaré lors d’une conférence de presse qu’Amazon « offre déjà ce que de nombreux syndicats demandent : des lieux de travail sûrs et inclusifs, des salaires compétitifs, des prestations de santé dès le premier jour et des possibilités d’évolution de carrière ».

C’est cette même entreprise qui est devenue tristement célèbre pour forcer ses travailleurs à uriner dans des bouteilles parce qu’on ne leur permet pas d’aller aux toilettes. Le nombre de décès sur le lieu de travail, le taux de blessures, les licenciements et les risques généraux sur le lieu de travail ont augmenté proportionnellement à ses marges de profit. Et, comme l’a déclaré un travailleur de Laval à CBC News, les conditions ne se sont pas améliorées depuis. « J’ai vu des gens se blesser. J’ai vu des gens se faire harceler, pleurer parce que les directeurs leur crient dessus, se faire suivre aux toilettes parce qu’ils ne peuvent pas prendre de pause toilette. » Voilà exactement pourquoi les travailleurs d’Amazon se syndiquent.

Cette situation a poussé M. Je-fais-pisser-mes-employés-dans-des-bouteilles Bezos et son équipe administrative à tout faire pour démanteler leur syndicat. Ils ont essayé de retarder les votes, d’intimider, de semer la peur et de mentir pour mettre fin à la campagne. Cela nous rappelle que les capitalistes se battront jusqu’au bout pour préserver leurs positions parasitaires dans la société. Toutefois, les travailleurs du monde entier finissent par comprendre qu’ils doivent s’unir contre leurs patrons. C’est par l’expérience que nous découvrons nos propres forces.


Delta et New Westminster, C.-B.

par Gabriel Lamonica-Sleczkowski

Les entrepôts d’Amazon sont tristement célèbres pour être des lieux où l’on se blesse et où l’on meurt. Il n’est donc pas surprenant que deux d’entre eux, situés en Colombie-Britannique, aient récemment déposé une demande de syndicalisation auprès d’Unifor. Ils seraient ainsi les premiers entrepôts d’Amazon à se syndiquer. Il s’agirait d’une victoire pour les travailleurs, qui pourrait inspirer d’autres luttes.

En Colombie-Britannique, si au moins 55% des travailleurs signent une carte syndicale, le milieu de travail est automatiquement accrédité sans deuxième vote.

Mais si l’entreprise ne fournit pas un nombre exact de salariés, comme le soupçonne Unifor, le syndicat devra deviner le nombre de cartes dont il a besoin pour accréditer les entrepôts en tant qu’unités de négociation.

Unifor a retiré ses demandes actuelles, déclarant qu’il doit vérifier les informations relatives aux employés. Mais il prévoit toujours de syndiquer les entrepôts. Nous avons demandé à un employé du service des emballages pourquoi il soutenait la campagne de syndicalisation. 

Il nous a parlé des conditions de travail éprouvantes dans le Centre de traitement. 

« Il faut scanner un article toutes les trois minutes. Sinon, tu reçois un avertissement. Si tu reçois six avertissements, tu es congédié. » 

« Tu ne peux pas scanner plusieurs articles et aller boire de l’eau ou aller aux toilettes. Si tu te blesses, tu dois aller faire une réclamation au “bureau de la sécurité”, et tu peux recevoir des avertissements en chemin. » 

Un autre travailleur, un vétéran de la distribution depuis plus de dix ans, nous a dit qu’alors que leur charge de travail a augmenté, la direction leur a retiré leurs avantages sociaux. « Avant, on avait de bonnes prestations de santé, des actions dans l’entreprise et des augmentations basées sur la productivité de l’entrepôt », a-t-il déclaré. « Tout cela a été supprimé. En septembre dernier, l’entreprise a déclaré qu’elle remplacerait ces avantages par une augmentation forfaitaire de deux dollars de l’heure – elle a ensuite ramené cette augmentation à un dollar de l’heure, et on ne l’a toujours pas reçue. »

Il n’est pas surprenant que ces travailleurs cherchent un moyen de lutter contre le géant. La syndicalisation n’est toutefois qu’un début. Même une victoire telle que la première syndicalisation d’un entrepôt d’Amazon au Canada ne suffirait pas à renverser l’entreprise. Pour gagner de manière décisive leurs droits et avantages sans crainte de rétractation, les travailleurs d’Amazon doivent prendre le contrôle de leur lieu de travail et le gérer démocratiquement.