Récemment, une « lettre ouverte » a été publiée en ligne par une personne anciennement membre qui contient de sérieuses allégations contre La Riposte socialiste/Fightback et la Tendance marxiste internationale. Dans cette lettre, nous sommes accusés de balayer la violence sexiste « sous le tapis ». Nous serions également complices de « véritable exploitation sexuelle, de culpabilisation des victimes et d’apologie des abus ». C’est absolument faux, comme nous allons le démontrer dans cette déclaration. Nous avons une politique de tolérance zéro en matière d’abus ou de harcèlement. Nous insistons pour enquêter sur chaque cas et lorsque la culpabilité est établie, nous prenons des mesures rapides – et c’est ce que nous avons fait dans les cas dont il est question. 

Les faits relatifs aux cas mentionnés dans la lettre ouverte sont d’une importance fondamentale. Dans le cas impliquant la personne ayant écrit la lettre ouverte, l’agresseur a été expulsé dans les huit jours suivant la date à laquelle nous avons été informés de l’agression. Dans un autre incident soulevé, l’agresseur a été suspendu après qu’une commission ait enquêté sur l’affaire et établi que des abus avaient eu lieu. Les allégations soulevées dans un troisième incident n’ont été portées à notre connaissance que dans la lettre ouverte elle-même et, en quelques jours, nous avons mis en place une commission de contrôle chargée d’enquêter sur l’affaire. 

Il est triste de constater que les abus ne sont que trop fréquents sous le capitalisme et, en tant qu’organisation comptant des centaines de membres, nous n’en sommes pas à l’abri. Nous avons la plus grande sympathie pour toutes les victimes d’abus, comme le sont des millions de personnes au Canada. Malheureusement, dans la lettre ouverte, les cas ont été politisés et utilisés pour former une critique de notre organisation fondée sur les politiques identitaires, qui a été diffusée sur les médias sociaux. On prétend que parce que nous ne sommes pas d’accord avec les politiques identitaires et leurs méthodes, nous protégeons en quelque sorte des agresseurs. Mais les faits montrent que le contraire est le cas. 

Une fois les faits connus, les seules critiques qui subsistent sont celles qui sont explicitement de nature politique, et qui n’ont absolument aucun lien avec le traitement approprié des cas d’abus. L’objectif de cette lettre ouverte est clair : causer un maximum de dommages à notre organisation et semer la confusion dans le mouvement en général. Nous espérons que cette déclaration aidera à clarifier le portrait pour tous.

Une attaque politique

La nature politique de ces critiques est évidente dans la lettre écrite par l’ex-membre, où les seules personnes nommées sont des leaders politiques de la TMI : Alex Grant, Ted Grant et Alan Woods. Curieusement, les noms des abuseurs sont absents. Les gens doivent se demander pourquoi il en est ainsi. Si le but de la lettre est de traiter les abus et de protéger les gens, pourquoi les abuseurs eux-mêmes ne seraient-ils pas nommés, plutôt que les personnalités politiques de la TMI (dont l’une est aujourd’hui décédée)?

Au début de la lettre, il est dit que lors de nos réunions de recrutement, nous demandons aux gens « s’ils sont d’accord avec la position de l’organisation contre la “culture du bannissement [call-out culture]”. » Ce n’est pas un sujet que nous abordons lors des rencontres de recrutement; nous ne pouvons donc que supposer que ce que la personne veut vraiment dire, c’est notre opposition ferme aux politiques identitaires, dont nous discutons en profondeur avec chaque nouvelle recrue. À partir de là, la lettre dresse un portrait reliant des faits, des demi-vérités et des faussetés pures et simples pour dépeindre une image complètement fausse de notre organisation et de nos politiques. 

Le crescendo final est une série de critiques politiques sans fondement de la TMI. Il est dit que Ted Grant, le principal théoricien de la TMI, était d’avis que l’homosexualité disparaîtrait sous le socialisme. Mais les sources fournies n’apportent pas une once de preuve à l’appui de cette affirmation. La lettre cite Alan Woods, qui critiquait l’abandon d’une position de classe par le Socialist Workers’ Party dans les années 1960, et tente de prétendre que, par conséquent, la TMI ne lutte pas contre l’oppression sous toutes ses formes. La malhonnêteté de ces affirmations est évidente pour tous et toute personne qui suit notre site web et participe à nos activités sur le terrain sait que tout cela est complètement faux.

Notre approche envers les cas d’agression

Notre organisation n’a aucune tolérance pour les agressions et les faits le confirment lorsqu’on examine les cas évoqués dans la lettre ouverte. Nous insistons sur la nécessité d’une enquête complète, d’un processus en bonne et due forme et de la mise en œuvre de mesures disciplinaires si la culpabilité est établie. Bien que ce processus soit rarement facile, prendre des mesures disciplinaires sans processus clair est dangereux car cela ouvre la possibilité d’utiliser des accusations à des fins politiques. De même, un processus en bonne et due forme est nécessaire pour protéger les victimes, car cela permet de prouver concrètement les accusations et, de cette façon, l’agresseur ne peut pas maintenir un discours de déni ou qui cherche à culpabiliser la victime lorsqu’il est reconnu coupable (ce qui se produit souvent lorsqu’il n’y a pas d’enquête appropriée). 

Malheureusement, le fait que nous ayons insisté pour enquêter correctement sur chaque cas et que nous n’ayons pas voulu mettre en œuvre des mesures disciplinaires sans avoir d’abord établi correctement les faits a été dénoncé comme étant « protéger les agresseurs ». Cette allégation n’est pas sérieuse. Une fois que les faits ont été établis et qu’il est apparu clairement que des abus avaient eu lieu, les agresseurs ont été retirés de l’organisation dans des conditions acceptées par les victimes. Tout cela s’est déroulé dans un délai relativement court. 

Cette méthode sérieuse n’est malheureusement pas la norme dans la gauche. Au lieu de cela, les rumeurs, les insinuations et les accusations vagues sont courantes et sont utilisées pour régler des comptes politiques ou personnels. L’absence de processus établi et l’acceptation des méthodes des politiques identitaires conduisent à des luttes intestines, à la démoralisation et au cynisme et sont généralement désastreuses pour le mouvement. Nous appelons à rejeter la culture des rumeurs et des insinuations qui ne contribue ni à établir les faits, ni à la lutte contre les abus. Au contraire, cette culture est le meilleur contexte pour créer la confusion entre ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas, et décourager les victimes de s’exprimer de peur que leurs paroles soient déformées et leur abus utilisé comme une arme politique. 

La nécessité d’adopter une attitude sérieuse à l’égard des processus en bonne et due forme est également importante lorsque l’on considère le rôle pernicieux que les fausses allégations ont joué pour déstabiliser et détruire des organisations révolutionnaires. L’exemple le plus notable est le programme COINTELPRO mené par le FBI, dont les efforts ont contribué à détruire de nombreuses organisations de gauche, dont les Black Panthers. Il serait naïf de penser que ces méthodes, incroyablement efficaces dans leur application, ne seront plus jamais utilisées par l’État ou d’autres parmi la gauche pour régler des comptes politiques. Si une organisation révolutionnaire décidait d’ignorer la nécessité d’un processus et de traiter chaque allégation comme un fait établi, elle s’exposerait à de futures attaques de la part d’acteurs étatiques (ou autres). Dans les faits, une telle organisation s’effondrerait comme un château de cartes au premier coup de vent. Bien sûr, cela ne préoccupe guère les « militants » de gauche sur Twitter, qui n’ont aucun intérêt à construire une organisation sérieuse et sont incapables de le faire. 

L’instrumentalisation des abus à des fins politiques

Dès le début, tandis que nous insistions pour régler les cas d’abus, l’ex-membre a insisté pour utiliser ces cas d’abus afin de formuler des critiques politiques contre notre organisation. Mais confondre des cas d’abus avec des critiques politiques, au point de retenir des informations sur les méfaits présumés jusqu’à ce que ces critiques soient traitées, ne fait qu’entraver notre capacité à traiter les abus. Un agresseur potentiel doit-il rester impuni jusqu’à ce que notre organisation revoie son approche sur les politiques identitaires? Cela a-t-il un sens?  

En fait, l’adoption des politiques identitaires ne contribue en rien à la lutte contre les abus. Nous en avons un bon exemple avec l’Organisation socialiste internationale (ISO) aux États-Unis, qui a adopté le postmodernisme et les politiques identitaires, en publiant des articles qui appuient ces idées. Cela n’a pas empêché l’ISO d’être plongée dans une crise en 2019, après qu’un « comité disciplinaire indépendant » soit arrivé à la conclusion que la direction nationale de l’ISO avait dissimulé un cas de violence sexuelle. Mais ce qui s’est passé avec notre organisation est précisément le contraire : nous n’avons pas adopté les politiques identitaires et nous avons un bon bilan en matière de traitement des abus. 

Nous sommes accusés de ne pas croire les victimes d’abus. Mais les faits ne soutiennent pas cette affirmation. La vérité est que nous avons écouté attentivement les deux victimes, que nous avons trouvé les présumés agresseurs coupables après des enquêtes approfondies et que nous les avons rapidement exclus de notre organisation. Une autre publication en ligne affirme que « Fightback double la mise sur la culpabilisation des victimes ». L’insinuation apparente ici est que nous avons blâmé les victimes pour avoir été agressées. Mais quand, où et comment nous l’avons fait, cela n’est pas mentionné. Nous n’avons jamais blâmé qui que ce soit pour les abus subis et de dire une telle chose représente une calomnie. 

Ce qui est réellement dit ici, c’est que parce que quelqu’un a été victime d’abus, ses critiques politiques plus larges doivent aussi être vraies. Quiconque tente de contester les critiques politiques ou organisationnelles formulées par quelqu’un qui a été victime d’abus ne doit donc pas croire la victime. Mais les faits montrent que nous croyons les victimes et que nous avons traité les deux cas de manière relativement rapide. Les mesures disciplinaires qui en ont résulté ont également été convenues en discutant avec les victimes.

Une méthode pour détruire la gauche

Nous devons être clairs. L’instrumentalisation d’allégations est la méthode pour détruire la gauche. Le mouvement doit accepter cette réalité et développer une approche sérieuse pour enquêter et traiter les cas d’abus. Cela signifie qu’il ne faut pas permettre que les cas d’abus soient instrumentalisés à des fins politiques et qu’il faut maintenir un processus en bonne et due forme afin que chaque cas puisse faire l’objet d’une enquête complète. Dans le cas contraire, les accusations peuvent être utilisées à des fins politiques et des mesures disciplinaires peuvent être prises avant que les faits ne soient établis. Cela crée un dangereux précédent qui nuit activement au mouvement et à la lutte contre l’oppression. 

Nous l’avons vu récemment en Grande-Bretagne où le mouvement autour de Jeremy Corbyn au sein du Parti travailliste a été détruit par l’instrumentalisation de fausses allégations d’antisémitisme. Mais le rapport de la Commission pour l’égalité et les droits humains a démontré que les cas d’antisémitisme étaient traités plus rapidement sous Corbyn que sous d’autres chefs du parti avant lui. Plus important encore, le rapport indique que le principal obstacle au traitement des cas de racisme était l’ingérence politique de la bureaucratie de droite du parti, qui instrumentalisait les accusations d’antisémitisme pour attaquer Corbyn et reprendre le contrôle du Parti travailliste. Malheureusement, Corbyn s’est plié à ces accusations, en admettant des fautes qu’il n’avait pas commises. Cela n’a fait que renforcer l’aile droite du parti qui a utilisé tout aveu de culpabilité pour intensifier ses attaques. 

La lettre ouverte mentionne également une situation qui s’est produite à l’Université York en 2018. Les événements se sont produits en pleine grève des auxiliaires d’enseignement, où des allégations ont été lancées contre nous par nos adversaires politiques. Il a été affirmé que nous protégions des agresseurs. Notre approche à l’époque était de demander des détails pour que nous puissions agir si un agresseur se trouve effectivement dans nos rangs, afin que nos membres et les militants du mouvement plus large soient protégés. Nous avons fait tout ce qui était en notre pouvoir à l’époque pour tenter de résoudre la situation, y compris en proposant un processus indépendant pour examiner la question. À ce jour, aucun agresseur n’a été nommé, mais des personnes politiquement hostiles envers La Riposte socialiste/Fightback soulèvent cette question afin d’essayer de nuire à notre organisation. La leçon à tirer de cette affaire est que nous n’avons pas cédé à ces attaques et que nous ne nous sommes pas excusés pour ce que nous n’avions pas fait. Nous n’avons pas fait ce que Corbyn a fait. Le résultat est que notre organisation est plus forte et que la nature politique de cette attaque est évidente pour tous. 

Le mouvement au Canada doit en tirer les leçons. La Riposte socialiste et la Tendance marxiste internationale défendent une approche sérieuse pour traiter les cas d’abus. Nous nous opposons à l’instrumentalisation des accusations à des fins politiques et nous insistons pour enquêter et agir sur chaque cas. 

Nous ne nous liquiderons pas

L’objectif clair de ces attaques en ligne est de dire que La Riposte socialiste et la TMI sont en faillite et que nous devons donc nous liquider en tant qu’organisation. Les appels à « ceux d’entre vous qui sont encore membres » à « quitter » démontrent le but de cette attaque. 

Il s’agit clairement d’une tentative des partisans des politiques identitaires postmodernes de détruire la plus large organisation marxiste du pays. Avec des références à l’ISO (qui s’est dissoute après avoir dissimulé une affaire d’agression sexuelle) et au SWP britannique (qui n’est plus que l’ombre de lui-même après avoir protégé un de ses dirigeants, accusé de viol), la lettre ouverte tente de jouer sur les émotions des gens pour attaquer notre organisation. Mais les faits sont là et les gens peuvent voir que ces accusations ne résistent pas à l’épreuve des faits. Contrairement à ces autres organisations, nous avons réglé les cas d’abus, et contrairement à elles, nous n’avons pas capitulé devant les politiques identitaires postmodernes.

Dissoudre une organisation qui s’est rapidement occupée d’agresseurs sexuels ne fait rien pour combattre les abus sexuels. Liquider la plus large organisation marxiste au Canada ne fait rien pour la classe ouvrière et les opprimés, et entrave directement la lutte contre l’oppression capitaliste. 

Nous ne nous laisserons pas décourager le moins du monde. Notre bannière est propre et nous continuerons à organiser et à construire les forces du marxisme au Canada. Nous continuerons à défendre une approche sérieuse dans la lutte contre les agressions sexuelles. Nous continuerons à combattre le système capitaliste et l’oppression qu’il exacerbe. La victoire du socialisme en dépend.