Le plafonnement des visas d’étude provoque une crise de l’éducation postsecondaire

Au début de l’année 2024, le gouvernement fédéral a annoncé une réduction de 35% des permis d’études internationaux qui seraient délivrés cette année-là, et une réduction supplémentaire de 10% en 2025. Cela a eu un impact dévastateur sur les revenus des établissements d’enseignement postsecondaire à travers le Canada.

  • Kiam Bellam
  • lun. 10 févr. 2025
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Le récent plafonnement du nombre d’étudiants étrangers a plongé le système d’éducation postsecondaire canadien dans une crise. Les collèges et les universités du pays sont devenus au fil des ans de plus en plus dépendants des frais de scolarité élevés payés par les étudiants étrangers. Et maintenant que cette source de revenus disparaît, leur sous-financement massif est révélé et ils ont commencé à couper dans les services et les programmes.

Des décennies de sous-financement  

Historiquement, les gouvernements provinciaux ont été les principaux bailleurs de fonds des collèges et universités publics du Canada. Mais les gouvernements ont progressivement réduit ou gelé les financements depuis les années 1980, au point qu’aujourd’hui les frais de scolarité représentent la majorité des revenus des collèges et des universités.

La plupart de ces frais de scolarité proviennent des poches des étudiants étrangers, qui paient des frais nettement plus élevés. À titre d’exemple, le collège Lambton de Sarnia tire deux fois plus de revenus des étudiants étrangers que des étudiants nationaux et du financement gouvernemental combinés.

Les gouvernements ont été bien conscients de cette transition. En 2023 (avant l’annonce du plafonnement du nombre d’étudiants étrangers), le gouvernement fédéral se vantait que les étudiants étrangers contribuaient pour plus de 22 milliards de dollars à l’économie canadienne, soit plus que l’industrie du bois ou de l’automobile.

Cette spoliation des étudiants étrangers a permis à la classe dirigeante canadienne de maintenir l’infrastructure éducative dont le pays a besoin à peu de frais. Ces étudiants étrangers ont été acceptés à bras ouverts lorsque cela convenait et était rentable pour le système capitaliste. Mais aujourd’hui, comme la classe dirigeante a été incapable de résoudre la crise du logement, elle s’est tournée vers les boucs émissaires que sont les immigrants, à commencer par les étudiants étrangers.

Le château de cartes s’écroule

Au début de l’année 2024, le gouvernement fédéral a annoncé une réduction de 35% des permis d’études internationaux qui seraient délivrés cette année-là, et une réduction supplémentaire de 10% en 2025. Cela a eu un impact dévastateur sur les revenus des établissements d’enseignement postsecondaire à travers le Canada.

En Ontario, les dépenses des collèges ont baissé de 752 millions de dollars au cours de l’exercice fiscal actuel et les universités ontariennes prévoient de perdre plus d’un milliard de dollars de revenus au cours des deux prochaines années.

Les universités McGill et Concordia au Québec, Dalhousie en Nouvelle-Écosse et Simon Fraser en Colombie-Britannique prévoient toutes des déficits pour cette année, ce qui est une première depuis plus de dix ans.

Sous le capitalisme, les déficits budgétaires sont synonymes de licenciements pour les employés des campus, d’augmentation des frais de scolarité et de réduction de la qualité de l’enseignement. Les établissements postsecondaires du pays ont déjà commencé à prendre des mesures d’austérité.

En octobre, le collège Seneca a annoncé la fermeture soudaine de l’ensemble de son campus de Markham, citant la baisse des inscriptions internationales comme la principale raison de cette fermeture. En mai, l’université Simon Fraser a fermé des programmes et licencié 85 travailleurs. Ces coupes ne sont qu’un début, et les administrations ont prévenu que d’autres étaient à venir.

Qui paie?

Alors que les établissements postsecondaires s’efforcent de s’adapter à cette réduction de revenus, les différents niveaux de gouvernement se sont montrés du doigt les uns les autres. Le ministre de l’Immigration, Marc Miller, a déclaré : « Je n’ai pas dit à aucune université ou collège de faire payer aux étudiants étrangers quatre ou cinq fois plus que ce que nous faisons payer aux étudiants nationaux » et « certains programmes devront fermer ».

Les administrations plaident pour que les gouvernements provinciaux lèvent les plafonds sur les frais de scolarité des étudiants nationaux, qui devront alors compenser les pertes de revenus. Quoi qu’il en soit, c’est aux étudiants et aux travailleurs que l’on demandera de payer pour la crise que le capitalisme a créée.

C’est la raison pour laquelle nous devons retirer le contrôle des institutions postsecondaires des mains des larbins du monde des affaires, qui sont en train de les mener à la ruine. Nous avons besoin d’écoles gérées dans la perspective de soutenir le bien-être général de la société. Nous avons besoin d’institutions gérées par les travailleurs et les étudiants des campus, tant nationaux qu’internationaux, toutes financées grâce aux profits des grandes entreprises.