La Baie d’Hudson laisse tomber les travailleurs canadiens

L’énorme capital accumulé par la principale entreprise coloniale du Canada partira exploiter un marché plus rentable, sans se soucier de ses travailleurs ni de toute soi-disant « fierté nationale ».

  • Kiam Bellam
  • mar. 8 avr. 2025
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La plus ancienne entreprise du Canada a fermé plus de 90 magasins de détail dans tout le pays et licencié au moins 9000 personnes. La Baie d’Hudson a cité les tarifs de Trump comme l’ayant poussé à fermer ses opérations canadiennes et pour sa procédure de faillite.

La presse a rapidement versé des larmes patriotiques pour cette entreprise apparemment en faillite. Il s’agit de renforcer l’idée que les travailleurs et les capitalistes canadiens sont dans le même bateau. On nous dit qu’il faut déplorer la perte de cette icône canadienne.

Cependant, même si les magasins La Baie fermeront dans tout le Canada, la Compagnie de la Baie d’Hudson (HBC) continuera à faire des profits sans problème. La raison en est que ses grands magasins canadiens représentent moins de 15% de l’ensemble des activités de l’entreprise. La grande majorité de ses activités consiste à détenir des biens immobiliers américains, des grands magasins aux États-Unis et des investissements dans les technologies de la vente au détail.

La compagnie détient 42 millions de pieds carrés de biens immobiliers aux États-Unis, d’une valeur de plus de sept milliards de dollars. Et en décembre dernier, HBC a signé un contrat de 2,65 milliards de dollars pour l’achat de la chaîne de magasins de luxe Neiman Marcus. Ce n’est pas du tout l’image de perdant en difficulté que l’on nous présente! En fait, le PDG de HBC, Richard Baker, a déclaré lors d’une interview en 2023 qu’il pensait que l’entreprise « n’avait jamais connu une telle valeur et une telle solidité financière depuis 1670 ».

Il n’y a pas d’Équipe Canada

Au cours des deux dernières décennies, HBC a consciemment déplacé ses investissements vers le marché américain, beaucoup plus vaste et plus rentable, comme de nombreuses autres compagnies. Maintenant que les perspectives de faire des profits sur le marché canadien se sont taries, l’entreprise a regroupé ses activités canadiennes dans sa propre filiale (celle qui est actuellement en situation d’insolvabilité) et a abandonné le navire.

Cette manœuvre a permis à l’entreprise de justifier le licenciement de ses 9000 employés sans indemnités de départ (alors que les dirigeants sortants devraient recevoir des primes de trois millions de dollars). Il y a également une myriade de petits fournisseurs canadiens qui dépendent de contrats commerciaux avec HBC et qui vont perdre d’énormes sommes d’argent promises en raison de la protection contre les créanciers de l’entreprise. « Nous sommes tous dans la même équipe », mon oeil! Dans la guerre commerciale, il y a deux camps. Ce n’est pas l’Équipe Canada contre les États-Unis, mais plutôt les patrons contre les travailleurs.

L’énorme capital accumulé par la principale entreprise coloniale du Canada partira exploiter un marché plus rentable, sans se soucier de ses travailleurs ni de toute soi-disant « fierté nationale ». Cette tendance n’est pas propre à HBC. 48% des patrons canadiens ont déclaré qu’ils prévoyaient de transférer une partie ou la totalité de leur production aux États-Unis en réponse aux tarifs de Trump. La classe ouvrière se retrouvera sans emploi et paiera une fois de plus pour la crise créée par le capitalisme. Les grandes entreprises canadiennes n’ont aucune loyauté envers les travailleurs, que ce soit au Canada ou ailleurs. Ils vous laisseront « acheter canadien » (c’est-à-dire acheter leurs produits) et fermeront ensuite boutique de toute façon. Le capitalisme est un système interconnecté à l’échelle mondiale; la réponse de la classe ouvrière à la guerre commerciale doit également être une lutte de classe unie à l’échelle internationale.