On se demandait comment la CAQ allait y arriver cette fois. Mais elle a trouvé le moyen. L’attentat islamophobe horrible de London du 6 juin dernier a été une autre occasion pour la CAQ et François Legault de s’insurger contre quiconque dénonce leur loi 21 et de se poser en victime.

L’attentat ayant fait quatre morts d’une même famille musulmane a choqué l’ensemble du Canada. Naturellement, les politiciens fédéraux conservateurs et libéraux ont versé leurs habituelles larmes de crocodile. La CAQ a bien dû entrer dans la danse aussi. 

Mais lorsque des journalistes du Canada anglais et Justin Trudeau lui-même ont commencé à sous-entendre (faussement) que la loi 21 est à blâmer pour l’attentat, alors là, l’indignation de la CAQ et des nationalistes identitaires a atteint des sommets!

La CAQ a ensuite fait adopter une motion dénonçant les amalgames « entre la tragédie de London en Ontario et une loi québécoise ». 

« Ce n’est pas vrai qu’on va laisser des journalistes du reste du Canada venir casser du sucre et traiter les Québécois de racistes », s’est indigné Legault. 

Une motion présentée par le Parti québécois dénonçant les amalgames « entre la tragédie de London en Ontario et une loi québécoise » a été adoptée sans opposition.

Le tour est joué! C’est le Québec en entier qui est la victime dans cette histoire. On a déjà joué dans ce film.

La loi 21, bien qu’islamophobe, n’est aucunement responsable de l’attentat de London. La classe dirigeante canadienne anglaise est bien capable d’être raciste par elle-même. Ces sous-entendus permettent à l’establishment anglophone de dévier l’attention de son propre racisme. De l’autre côté, ces sous-entendus permettent ensuite à Legault et aux nationalistes identitaires de se poser en victime et redoubler d’efforts dans la défense de la loi 21.

Cet exemple montre bien comment l’anglo-chauvinisme et le nationalisme identitaire vont ensemble et se renforcent. Il faut les combattre tous les deux. Au Québec, notre rôle premier est de démasquer notre propre classe dirigeante.

Lutte contre… l’antisémitisme?

En plus de se poser en victime, la CAQ a profité de l’attentat pour en passer une petite vite.

Affirmant que les événements à London démontrent « combien la haine envers certaines communautés peut avoir des conséquences tragiques », le ministre québécois de la Lutte contre le racisme, Benoit Charette, a fait adopter par l’Assemblée nationale… la définition de l’antisémitisme de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA)!

L’adoption de cette définition n’est pas anodine. Elle s’inscrit dans le cadre d’une campagne internationale de l’IHRA pour faire reconnaître sa définition comme la bonne. Or, sa définition présente les critiques de l’État d’Israël comme étant de l’antisémitisme. Sept des onze exemples utilisés dans la définition sont reliés à Israël. Comme le dit Aaron Lakoff de Voix juives indépendantes, « la définition de l’antisémitisme de l’IHRA vise plus à limiter la liberté d’expression sur Israël et la Palestine que de rendre le monde plus sécuritaire pour les Juifs ». Québec solidaire a refusé avec justesse de voter pour la motion de la CAQ, qui ne fait rien pour combattre le fléau de l’antisémitisme.

Sur cette question aussi, les politiciens du Québec comme du Canada anglais font preuve d’une hypocrisie puante. Les conservateurs ontariens de Doug Ford ont adopté la même définition l’an dernier, sans pourtant récuser leur association avec la suprémaciste blanche et antisémite Faith Goldy. Et la CAQ, si elle voulait vraiment combattre l’antisémitisme, se poserait des questions sur sa loi 21 – qui est clairement antisémite! Effectivement, elle empêche une personne juive portant la kippa de devenir enseignante si elle souhaite porter son signe religieux. Quand allez-vous agir contre cette flagrante discrimination antisémite, M. Charette? 

On récolte ce que l’on sème

Mais malgré ses petits jeux habituels, la CAQ a reçu une petite claque au visage bien méritée avec l’attentat.

Lors de la vigile en solidarité avec les victimes de London à Montréal, le ministre Charette, invité à donner un discours, a été hué par la foule. Malgré les remontrances des organisateurs contre les participants, ceux-ci criaient par-dessus Charette et lui ont tourné le dos. 

Qui sème la haine récolte la haine.

Les participants en colère à la vigile ne sont pas des anglophones qui croient que « le Québec est raciste ». Mais ils reconnaissent à juste titre que la CAQ alimente le racisme et l’islamophobie.

Depuis 15 ans, chaque « débat » sur les signes religieux est le théâtre d’une montée des actes islamophobes en particulier. La CAQ et les nationalistes identitaires qui ont entretenu ces discussions portent la responsabilité de la montée de la haine islamophobe, non en Ontario, mais certainement ici au Québec.

Nous l’avons déjà dit par le passé : la loi 21 n’allait jamais clore le « débat » sur les signes religieux et nous faire passer à autre chose. Périodiquement, la CAQ et les nationalistes identitaires trouvent des prétextes pour la défendre, pleurnicher pour supposément défendre les Québécois accusés de racisme, et marquer quelques points politiques sur le dos des minorités opprimées. Malheureusement, les députés de Québec solidaire sont encore une fois tombés dans le panneau, eux qui ont appuyé la motion du PQ sur les amalgames précédemment mentionnée, faisant ainsi le jeu du gouvernement. 

La gauche et le mouvement ouvrier devraient plutôt dénoncer sans détour la CAQ à chaque fois qu’elle défend la loi 21, et patiemment exposer le nationalisme réactionnaire de la CAQ.