Édition Nº 13

Révolution communiste
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La position communiste sur la guerre commerciale

Ce n’est pas notre guerre.

  • Joel Bergman
  • jeu. 27 févr. 2025
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La guerre commerciale naissante entre les États-Unis et le Canada est devenue la question centrale dans la vie politique canadienne. Quelle que soit l’issue de cette situation, les relations entre les deux pays sont irrémédiablement bouleversées. Cela aura des conséquences considérables sur l’économie, la politique et la lutte des classes.

« Équipe Canada »

Dans une quasi-unanimité, tous les grands partis politiques, ainsi que des dirigeants syndicaux et des chefs d’entreprise se sont unis dans ce qu’ils appellent « l’équipe Canada » pour s’opposer à Trump. Ils s’entendent tous sur la nécessité d’imposer des contre-tarifs sur les produits américains et d’inciter les gens à « acheter canadien ».

D’un bout à l’autre du spectre politique, on nous sermonne sur la nécessité de nous unir contre la menace extérieure. Par exemple, les anciens premiers ministres Stephen Harper, Joe Clarke, Kim Campbell, Jean Chrétien et Paul Martin ont rédigé une lettre ouverte encourageant les Canadiens à faire preuve de fierté nationale. Trudeau a mis en place le conseil sur les relations canado-américaines, qui réunit divers politiciens, dirigeants syndicaux et capitalistes dans le but déclaré de rallier la population pour qu’elle soutienne le gouvernement contre Trump.

On voit une résurgence de la fierté nationale, qui selon les sondages est passée de 58% à 67%. L’augmentation la plus forte a été enregistrée au Québec, avec une hausse de 13 points. Il existe de nombreuses preuves anecdotiques de ce phénomène, comme lorsque les supporters canadiens ont hué l’hymne national américain lors des matchs de hockey.

Sur le plan politique, le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, qui était initialement le plus ferme à l’égard de Trump, est monté en flèche dans les sondages, atteignant des niveaux de popularité jamais vus depuis un siècle. Les libéraux fédéraux ont également été miraculeusement ressuscités. Alors qu’ils risquaient d’être décimés par les conservateurs de Pierre Poilievre, les sondages montrent aujourd’hui qu’avec Mark Carney à la barre, ils sont au coude à coude.

L’approche communiste

Cette montée du nationalisme canadien possède deux faces. D’une part, les travailleurs canadiens ont de réelles craintes. En particulier, beaucoup de gens craignent de perdre leur emploi ou le système de santé. Ce sentiment est tout à fait progressiste.

Cependant, d’un autre côté, la classe dirigeante canadienne utilise ce sentiment et le canalise dans la défense des intérêts des capitalistes canadiens. Il s’agit d’une tromperie réactionnaire que les communistes s’efforcent de démasquer.

Le fait est que ces politiciens capitalistes et entrepreneurs canadiens n’ont pas nos intérêts à cœur – et, de manière fondamentale, ont des intérêts opposés à ceux des travailleurs canadiens.

Le principal ennemi de la classe ouvrière canadienne n’est pas Donald Trump, mais la classe capitaliste canadienne et ses représentants. Bien sûr, Donald Trump est un ennemi, mais nous ne pouvons pas compter sur les chefs d’entreprise canadiens et les politiciens bourgeois qui ne défendent que leurs intérêts étroits et sacrifieront la classe ouvrière à la première occasion.

C’est ce qu’a déclaré ouvertement l’ancien premier ministre Stephen Harper lors du lancement de son nouveau livre : « Si j’étais encore premier ministre, je serais prêt à appauvrir le pays et à ne pas être annexé, si c’était le choix auquel nous étions confrontés […]. J’accepterais n’importe quel niveau de dommages pour préserver l’indépendance du pays. »

Harper peut dire ces choses ouvertement parce qu’il n’aura pas à subir les conséquences politiques d’une telle honnêteté. Mais tous les représentants clairvoyants de la classe dirigeante adhèrent à ce point de vue commun. Le fait que ces commentaires aient été accueillis par des applaudissements enthousiastes de la part de ses invités exclusifs montre que ce point de vue est largement accepté dans les cercles bourgeois.

Trudeau, quant à lui, continue de prétendre qu’il se préoccupe des travailleurs en affirmant qu’il « défendra les travailleurs canadiens ». Mais son bilan montre qu’il n’en est rien.

En 2024, les libéraux ont retiré le droit de grève aux cheminots, aux débardeurs des ports de Vancouver et de Montréal ainsi qu’aux travailleurs des postes. Ces messieurs-dames qui se soucient tant des travailleurs canadiens ont pris ces décisions sans débat ni vote au Parlement, du jamais vu. Et pour couronner le tout, les chemins de fer sont principalement détenus par des capitalistes américains!

Par conséquent, nous ne devrions pas compter sur les libéraux ni sur aucun des partis de la classe dirigeante canadienne pour protéger les travailleurs canadiens.

Le summum de l’hypocrisie nationaliste canadienne a été clairement atteint par le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, qui revêtait récemment sa casquette de style MAGA avec les mots « Le Canada n’est pas à vendre ». Considérant que Ford a été pris en flagrant délit à vendre les zones protégées de la ceinture de verdure de l’Ontario à ses riches amis promoteurs, l’ironie de la situation est mordante.

De même, le premier ministre du Québec, François Legault, qui fait beaucoup de tapage pour « défendre le Québec », est le même qui s’est rangé du côté d’une entreprise américaine contre un syndicat québécois lorsque l’entreprise (ABI) les a mis en lock-out pendant 18 mois.

Non, ces gens ne sont pas de notre côté. 

L’une des principales préoccupations de nombreux travailleurs canadiens face à la menace de Trump d’annexer le Canada concerne notre système de santé. Personne ne veut d’un système de santé privé comme celui qui existe au sud, où des vautours comme UnitedHealth réalisent des profits considérables en refusant des demandes d’indemnisation à des personnes malades.

Mais encore une fois, pourquoi compterions-nous sur ces politiciens capitalistes pour protéger notre système de santé? Si l’on examine les faits, ces Canadiens si patriotiques sont ceux-là mêmes qui ont systématiquement sous-financé, démantelé et privatisé notre système de santé. Doug Ford a lui-même privatisé des chirurgies en Ontario et la première ministre de l’Alberta, Danielle Smith, a été prise en flagrant délit pour avoir licencié la directrice générale des services de santé de l’Alberta qui avait dénoncé sa privatisation corrompue des chirurgies.

Ce qui est clair, c’est qu’en dépit de ce qu’ils prétendent, il n’y a en réalité pas d’équipe Canada. Il y a un Canada pour les capitalistes et un Canada pour les travailleurs. Et nous ne sommes pas dans la même équipe.

Il s’agit essentiellement d’un conflit entre deux groupes de capitalistes, chacun exploitant impitoyablement « ses » travailleurs dans son pays. Par conséquent, cette guerre commerciale n’est pas notre guerre.

Contre-tarifs et « acheter canadien »

Tous les partis affirment que nous avons besoin de contre-tarifs pour protéger les emplois canadiens. C’est sans compter que les tarifs n’ont rien à voir avec la défense des emplois. Du point de vue de la classe dirigeante canadienne, l’objectif principal des tarifs est de protéger leur position dominante sur leur marché.

Et ce sont souvent les secteurs les plus protégés qui sont les plus impitoyables dans leurs relations avec les travailleurs et les consommateurs canadiens. Par exemple, les banques, les compagnies aériennes et les sociétés de télécommunications américaines sont interdites d’accès au marché canadien.

Mais les grands monopoles canadiens des télécommunications sont connus pour escroquer les consommateurs en leur proposant des contrats de téléphonie cellulaire parmi les plus chers du monde. Air Canada, la seule compagnie aérienne nationale du Canada, a été privatisée dans les années 80 et est notoirement dispendieuse. Elle a même récemment annoncé qu’elle allait commencer à faire payer les bagages en cabine.

Ces industries ne sont pas protégées pour notre bien – il s’agit simplement pour le gouvernement canadien de protéger les monopoles de ses amis afin qu’ils puissent mieux arnaquer les consommateurs canadiens.

Les contre-tarifs joueront un rôle similaire en protégeant les capitalistes canadiens qui abusent des travailleurs et des consommateurs canadiens. En outre, les contre-tarifs feront grimper le prix des produits importés, une charge qui pèsera principalement sur les travailleurs et les pauvres.

Tous les principaux partis capitalistes nous encouragent à boycotter les produits américains et à « acheter canadien ». Mais cela non plus ne sauvera pas d’emplois. Tout comme les contre-tarifs, le fait de n’acheter que des produits fabriqués au Canada profite aux capitalistes canadiens. En pratique, cela signifie soutenir Galen Weston et Loblaws, plutôt que la famille Walton et Walmart. Mais toutes ces entreprises ont des prix abusifs et réalisent d’énormes profits sur le dos de familles pauvres qui peinent à subvenir à leurs besoins.

Acheter canadien signifie donner des contrats d’infrastructure à la société corrompue SNC Lavalin ou acheter des avions à Bombardier, qui a bénéficié de tant de plans de sauvetage du gouvernement que nous avons perdu le compte.

Est-ce que ces entreprises canadiennes traitent vraiment mieux le travailleur canadien moyen que leurs homologues américains? Lorsque l’on regarde la situation en face, il est clair que la classe ouvrière n’a aucun intérêt dans cette lutte.

La lutte des classes

Au moment d’écrire ces lignes, les tarifs n’ont pas encore été imposés. Mais 56% des entreprises interrogées ont déclaré qu’elles procéderaient à des licenciements si les tarifs étaient appliqués.

Cela signifie que des centaines de milliers d’emplois sont menacés. Mais soyons très clairs : ce sont les capitalistes canadiens qui licencieront les travailleurs canadiens. Ce seront ces capitalistes canadiens si patriotiques qui réduiront les salaires et les avantages sociaux pour protéger leurs profits.

Au lieu du protectionnisme, les communistes avancent une politique d’indépendance de classe et des méthodes de lutte combatives afin de protéger les emplois et toutes les réformes progressistes que les travailleurs canadiens ont gagnées au fil des ans.

Nous ne pouvons compter que sur la force de notre propre classe. Si les capitalistes canadiens ferment des usines en raison de la guerre commerciale, alors les travailleurs devraient occuper ces usines et exiger qu’elles soient nationalisées sous le contrôle des travailleurs. C’est le seul moyen de protéger les emplois et de maintenir la production.

Si une entreprise demande des licenciements ou des réductions de salaire pour « rester compétitive », les livres de comptes doivent être ouverts pour que les travailleurs puissent voir par eux-mêmes ce qu’il en est. La bourgeoisie canadienne, qui aime parler de la protection de la « souveraineté canadienne », niera le droit des travailleurs à examiner les livres de comptes des entreprises – ce qui prouvera que pour elle, la véritable souveraineté à laquelle elle tient est son contrôle sur la production et sa capacité à faire des profits sur le dos des travailleurs.

Pour une fédération socialiste des Amériques

Tandis que nous ne pouvons pas faire confiance à la classe dirigeante canadienne, nous avons un allié naturel dans la classe ouvrière américaine. La solidarité entre nos deux classes ouvrières a des racines profondes tout au long de l’histoire des deux pays. En fait, les principaux syndicats au Canada sont des syndicats internationaux créés par le mouvement syndical américain.

La plupart des militants syndicaux les plus dévoués de l’époque étaient regroupés au sein des Industrial Workers of the World, qui ont inventé l’expression « One Big Union » (un seul grand syndicat). L’idée fondamentale était correcte à l’époque et le reste : une plus grande union des travailleurs des différents pays.

Il est dans l’intérêt de la classe ouvrière des deux côtés de la frontière de raviver cet internationalisme et de retisser les liens de la solidarité de classe.

Lorsque Trump a qualifié la frontière canado-américaine de « ligne artificiellement tracée », il a choqué beaucoup de gens au sein de l’élite politique. Mais d’une manière déformée, Trump touche une vérité. L’État-nation est un obstacle au développement des forces productives. Une union économique plus grande serait plus efficace et permettrait aux marchandises et à la main-d’œuvre de circuler plus librement.

Mais dans le cadre du capitalisme, cela ne profiterait qu’aux capitalistes. C’est pourquoi les élucubrations de Trump ne sont qu’un rêve réactionnaire qui ne mènera à rien de bon pour la classe ouvrière.

La seule façon de libérer ce potentiel latent ne serait pas par l’annexion, mais par une fédération socialiste volontaire du Canada, du Québec, des États-Unis, du Mexique et de toutes les autres nations des Amériques.

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