À l’automne 2008, nous avons assisté au début de la plus grande crise que le système capitaliste ait connue depuis la Grande Dépression de 1929. Alors que l’effet de cette crise se fait pleinement sentir, cela soulève la question suivante : qu’en sera-t-il de notre système éducatif? Si les gouvernements capitalistes ont attaqué des étudiants lors d’un « boom », que vont-ils faire en réaction à cette crise économique?

Toutes ces attaques contre les étudiants ont provoqué une montée en flèche de l’endettement des étudiants au Canada. La Fédération canadienne des étudiants et étudiantes a annoncé récemment que le total de dettes liées au système de prêts étudiants au Canada a désormais dépassé le seuil record de 13 milliards de dollars, et augmente à un rythme de 1,2 million de dollars par jour. Les étudiants collégiaux et universitaires au Canada ont un profil de dette plus élevé que n’importe quel autre groupe de personnes dans le pays. La FCÉÉ a aussi dit que ce montant de 13 milliards de dollars n’inclut pas les 5 milliards de dollars que les élèves doivent aux provinces, ni celle qu’ils doivent aux banques, aux multinationales de crédit, ainsi qu’à leurs parents. La moyenne des étudiants au Canada doit plus de 25 000 $ suite à l’obtention de son diplôme, ce qui ajoute une dépense considérable et suffocante une fois qu’elle ou il fait partie de la population active. Tout cela s’est passé avant que ne frappe la crise financière. Néanmoins, ce n’est que la pointe de l’iceberg de notre système d’éducation en décomposition.

De plus, les étudiants ne sont pas seuls dans cette situation financière précaire. Les universités canadiennes dans leur ensemble sont enlisées dans un endettement massif, avec une valeur de dette cumulée de plus de 3 milliards de dollars. L’Université de l’Ontario Institut de Technologie doit plus de 217 millions de dollars, l’Université d’Ottawa doit 211 millions de dollars, l’Université de Waterloo en est à 132 millions de dollars au-dessus de sa tête, l’Université de Toronto a une facture de plus de 557 millions de dollars et l’Université du Québec à Montréal a subi une énorme dette de 565 millions de dollars. De même, l’Université Concordia a récemment publié une dette de 430 millions de dollars tout en construisant un nouveau bâtiment pour l’École de Gestion John Molson.

Et comment les universités canadiennes pensent-elles se sortir de l’endettement? La tendance globale a été de faire payer davantage les étudiants et les travailleurs. À Concordia, tandis que le Conseil des gouverneurs s’occupait à élever les frais de scolarité de 500 $ par année pour les étudiants canadiens et 1000 $ par années pour les étudiants internationaux, ils récompensaient le président sortant Claude Lajeunesse avec un bonus de 1,2 million $. Ceci a été combiné à une coupure de 100 millions de dollars sur les bourses aux plus démunis et un refus de négocier avec les travailleurs à temps plein et temps partiel du corps professoral. À l’UQAM, pour faire face à une dette massive, l’administration a embauché un consultant financier, PricewaterhouseCoopers, qui a produit un rapport en mars 2008 suggérant des moyens pour faire face à la crise financière de l’UQAM. Ils ont proposé, entre autres, la suppression de 77 postes d’enseignement, le gel salarial des employés, et l’augmentation des frais de scolarité des étudiants. Ce ne sont que quelques exemples de la tendance générale dans notre système éducatif.

Au cours de la période écoulée, les universités canadiennes ont massivement investi dans les caisses de retraite et dans les marchés boursiers. Dans le but de rendre les universités canadiennes moins dépendantes du financement public, il y a eu un mouvement continu vers un modèle de type capitaliste étasunien. Ces politiques ont donné des résultats désastreux tandis que ces fonds ont désormais pris des hausses de 30 % dans certaines universités canadiennes. Comme d’habitude, ce sont les travailleurs et les étudiants qui sont les premières victimes de cette crise.

Avec la plongée radicale des marchés boursiers à travers le monde, les pensions investies en actions ont subi des pertes massives. Plusieurs milliards de dollars des fonds de dotation dans les universités sont utilisés pour financer des subventions, des bourses et même les salaires des professeurs avec l’intérêt acquis par l’investissement. De plus, nombre de ces investissements ont pris de grands coups suite à leur exposition au marché. L’Université de Toronto, qui dispose du plus grand fonds de dotation des universités canadiennes, a été frappée d’une perte de 29,5 %, soit 1,3 milliard de dollars de leurs investissements. L’Université de la Colombie-Britannique et l’Université McGill ont elles aussi subi des pertes d’environ 20 %. Ces pertes massives provoquées par les conseils universitaires sont alors transmises aux étudiants et au personnel universitaires par la diminution de salaire, les congédiements, et l’augmentation des frais de scolarité.

Nous sommes donc victimes du sous-financement chronique de notre système éducatif. Et désormais, face à la crise économique, l’administration universitaire, avec leurs alliés à la bourse, exige davantage de réductions et d’attaques. Tant que nous adhérons à un système économique pourri, nous serons contraints de vivre dans des conditions de plus en plus médiocres. Il y a plus qu’assez d’argent pour financer le système éducatif au complet et fournir des salaires décents avec avantages pour tous les travailleurs de nos institutions d’éducation. La plupart des pays d’Europe occidentale peuvent même se permettre d’offrir la gratuité de l’enseignement postsecondaire à tous les étudiants. Tandis que l’éducation est de moins en moins accessible aux Canadiens, le gouvernement peut se permettre de donner une coupure de taxe de 50 milliards de dollars aux grandes entreprises, donner des centaines de milliards de dollars de renflouement aux banques et les trois grands fabricants d’automobiles, et de dépenser des milliards de dollars chaque année dans l’occupation d’Afghanistan!

Tandis que les élèves reprennent leurs études cette année, il est important pour les étudiants militants d’évaluer et d’analyser les luttes récentes, afin d’apprendre du passé au profit de la lutte dans l’avenir. Il est fondamental que nous comprenions que nous avons besoin d’un mouvement étudiant qui se bat pour défendre les acquis du passé. Les syndicats étudiants doivent entreprendre une campagne générale contre toute attaque. Toute augmentation des frais de scolarité, toute réduction du financement de l’éducation ou encore des attaques sur les enseignants doivent être affrontées avec un mouvement étudiant unifié et organisé par nos syndicats étudiants, allié avec les syndicats des travailleurs et prêt à repousser les attaques du gouvernement et de l’administration.