L’égoïsme : un obstacle au socialisme?

 L’une des objections les plus fréquentes aux idées du marxisme peut se formuler ainsi : « le socialisme est impossible parce que l’égoïsme des hommes est un attribut fondamental de leur “nature”. Même en supposant une révolution victorieuse, la socialisation des moyens de production sera minée par l’avidité et la soif de pouvoir des individus. N’est-ce pas […]

  • Révolution (www.marxiste.org)
  • jeu. 3 janv. 2019
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 L’une des objections les plus fréquentes aux idées du marxisme peut se formuler ainsi : « le socialisme est impossible parce que l’égoïsme des hommes est un attribut fondamental de leur “nature”. Même en supposant une révolution victorieuse, la socialisation des moyens de production sera minée par l’avidité et la soif de pouvoir des individus. N’est-ce pas ce qu’a montré la dégénérescence de la révolution russe, avec sa bureaucratie privilégiée? »

Cet argument repose sur des prémisses fausses. Les idées, la psychologie et le comportement des hommes ne découlent pas d’une « nature humaine » ; ils sont déterminés par l’ensemble des rapports sociaux – économiques, politiques, idéologiques, etc. – d’une époque donnée. Or ces rapports sociaux changent constamment. Le grand apport de Marx fut d’identifier le développement des forces productives comme le facteur le plus déterminant, en dernière analyse, dans l’évolution des rapports sociaux.

Ainsi, il n’y a pas de « nature humaine » invariable et qui transcenderait l’histoire. Comme l’écrivait Marx : « ce n’est pas la conscience des hommes qui détermine leur être; c’est inversement leur être social qui détermine leur conscience. » Pendant toute la période du « communisme primitif », avant les premières sociétés esclavagistes, il n’y avait pas de classes sociales, pas d’Etat, pas d’oppression des femmes – et donc pas d’égoïsme ou de soif de pouvoir. Par contre, les rapports de production capitalistes, où règnent la propriété privée et la concurrence entre bourgeois, mais aussi entre travailleurs, forment la base matérielle des comportements égoïstes. L’idéal des capitalistes, c’est l’atomisation complète des travailleurs. Et bien sûr, ils promeuvent cet idéal de mille et une manières : à travers les médias, l’école, la religion… Comme l’expliquait Marx, « les idées dominantes, dans la société, sont les idées de la classe dominante ».

Malgré cela, les travailleurs se syndiquent et s’organisent. Ils luttent ensemble pour leurs intérêts collectifs. Ainsi, sous le capitalisme, il y a de l’égoïsme, mais aussi son contraire : de la solidarité. Et la révolution socialiste portera à son plus haut niveau la solidarité entre travailleurs.

Ce n’est pas tout : le capitalisme a développé les forces productives, la science et la technologie à un niveau tel que, pour la première fois de l’histoire, les bases matérielles d’une société d’abondance existent, à condition de renverser le capitalisme et de planifier démocratiquement l’économie. Dans une société socialiste, qui permettra de satisfaire tous les besoins matériels des hommes, il n’y aura plus de base matérielle à l’égoïsme et à la lutte de tous contre tous. Inversement, c’est l’isolement et l’arriération économique de la Russie révolutionnaire qui furent les causes ultimes de sa dégénérescence bureaucratique. L’émergence du stalinisme a confirmé cette idée de Marx : on ne peut pas construire le socialisme sur fond de pénurie.