La septième édition de l’École marxiste d’hiver de Montréal qui a eu lieu lors de la fin de semaine du 18 et 19 février 2017 à l’Université Concordia a dépassé toutes les attentes. Alors que l’année passée, 110 personnes avaient assisté à l’École d’hiver, cette année, plus de 200 personnes provenant du Canada, des États-Unis, du Mexique, de la France et du Royaume-Uni ont assisté aux présentations et aux discussions de la fin de semaine! L’École fut presque entièrement consacrée à la question de la révolution russe de 1917, afin de célébrer et de comprendre l’événement le plus important de l’histoire de l’humanité à l’occasion de son centenaire. L’enthousiasme des participant-es était palpable. Cette fin de semaine fut la preuve indéniable de la vitalité des idées marxistes!

La révolution russe : ce qu’elle a accompli et pourquoi elle a dégénéré

La première présentation a été donnée par Alan Woods, militant marxiste de longue date et rédacteur du site Web In Defence of Marxism, sur le sujet des leçons de la révolution russe. Alan n’a pas manqué de souligner que ce fut la première fois dans l’histoire où la classe ouvrière et les opprimé-es engagèrent la lutte contre leurs oppresseurs, et remportèrent la victoire. Il a expliqué que c’est précisément pourquoi la bourgeoisie aujourd’hui ressent le besoin de salir la révolution et de la couvrir de calomnies. 

Alan a montré comment les marxistes russes d’avant la révolution de 1917 militaient dans des conditions bien pires que les nôtres, soit dans le pays le plus réactionnaire du monde, doté d’une police secrète infiltrant toutes les couches de la société, même les sommets du parti bolchévique, ce qui n’empêcha pas la révolution de réussir. La révolution de février, bien qu’elle ait renversé le régime tsariste et donné naissance aux soviets, confia toutefois le pouvoir à un gouvernement bourgeois. Pour définitivement retirer le pouvoir à la bourgeoisie en octobre, les bolchéviks eurent à gagner la confiance des masses. Ils y parvinrent grâce à des slogans clairs qui reflétaient l’état d’esprit des masses : la paix, le pain et la terre. Alan a aussi souligné l’importance du slogan bolchévique « Tout le pouvoir aux soviets ». C’est grâce à ces slogans clairs et à cause de l’impotence de la bourgeoisie russe que les bolchéviks réussirent à prendre le pouvoir presque sans effusion de sang en octobre. Loin d’être le coup d’État dont parlent sans cesse les historiens bourgeois, la révolution d’octobre 1917 fut la révolution la plus démocratique que l’histoire ait connue. Elle demeure aujourd’hui une énorme source d’inspiration.

La deuxième présentation de la première journée a été donnée par Julien Arseneau, membre de la rédaction de La Riposte socialiste, sur les raisons de la dégénérescence de la révolution russe. Julien a expliqué que tout militant-e qui se déclare marxiste aujourd’hui sera inévitablement confronté à des questions sur l’Union soviétique et que, conséquemment, il ou elle doit avoir des réponses. Les raisons de la dégénérescence ne sont pas à chercher dans la seule personnalité de Staline, mais dans les conditions matérielles de l’époque. La Russie soviétique prenait naissance dans des conditions économiques, sociales et culturelles trop arriérées pour instaurer socialisme, et tous comprenaient que la révolution devait se répandre aux pays plus avancés afin d’aller de l’avant. Il y a bel et bien eu une vague révolutionnaire dans le reste du monde suite à la révolution russe, mais les soulèvements dans les différents pays n’ont pas réussi à renverser le capitalisme.

L’isolement de la révolution et le caractère arriéré de l’économie russe, aggravé par les dures années de guerre, sont les raisons fondamentales de la dégénérescence de la révolution. La présentation a aussi permis de faire comprendre que le stalinisme et le bolchevisme n’ont rien de commun, contrairement au mythe sciemment répandu par la bourgeoisie. Si tel était le cas, pourquoi alors Staline a-t-il du exterminer d’une manière ou d’une autre tous les membres du comité central bolchévique de 1917, à une exception près? Ce simple fait montre qu’une rivière de sang sépare le bolchévisme du stalinisme. 

Julien a aussi expliqué que malgré la façon dont s’est terminée la révolution, nous devons défendre la tradition du bolchévisme, enrichie par les écrits de Léon Trotsky. Enfin, il a souligné à grands traits que les conditions misérables de la Russie soviétique n’existent plus, et que les révolutions de l’avenir se feront dans des conditions beaucoup plus favorables qu’à l’époque. 

La troisième et dernière présentation de la journée portait sur le développement des clubs étudiants de La Riposte socialiste et Socialist Fightback à travers le Canada, de Montréal à Victoria, en passant par Toronto et Edmonton. Farshad Azadian, membre de la rédaction de Fightback, a officialisé le lancement de La Riposte socialiste étudiante, une bannière nationale voulant rallier les

 étudiant-es qui souhaitent s’organiser et lutter pour le socialisme. Expliquant le rôle fondamental de la jeunesse dans les mouvements révolutionnaires passés, Farshad a souligné l’importance de construire les forces du marxisme sur les campus du pays. La Riposte socialiste et Socialist Fightback sont actuellement présents sur une dizaine de campus à travers le Canada. Si vous souhaitez démarrer un club sur votre campus, entrez en contact avec nous et nous pourrons vous aider à le faire! 

« La révolution ne connaît pas de frontières »

Pour la deuxième journée, Alex Grant, rédacteur en chef de Fightback, présentait sur les répercussions de la révolution d’octobre 1917 en Amérique du Nord, un sujet tout aussi intéressant qu’il est généralement peu connu. La révolution russe fut l’étincelle qui raviva le mouvement ouvrier tout autour du monde. Les classes dirigeantes des États-Unis et du Canada le comprirent très bien, alors que les partis socialistes furent déclarés illégaux et que leurs journaux furent confisqués. En Amérique, les grèves générales de Seattle et de Winnipeg en 1919 furent toutes deux un écho de la victoire d’octobre 1917. 

Cependant, ces grèves montrèrent l’insuffisance de la lutte purement syndicale. Elles pavèrent la voie à la formation de partis communistes des deux côtés de la frontière. Le bolchévisme était dans une position extrêmement favorable pour devenir le courant dominant du mouvement ouvrier canadien et étasunien au début des années 1920, un processus qui fut coupé court par la montée du stalinisme.

Également, Alex a montré concrètement comment la solidarité de classe mit fin à l’intervention armée canadienne et étasunienne sur le sol russe. Il a notamment parlé de la mutinerie de Victoria, où les soldats canadiens n’embarquèrent sur le bateau qu’après avoir subi des coups de fouet et avoir été menacés de mourir à coups de baïonnette. Par la lecture d’un poème émouvant écrit par un soldat canadien, Alex a mis en lumière le moral des troupes, qui n’avaient aucune envie d’aller massacrer leurs frères et sœurs. Au final, c’est cette solidarité internationale de classe qui força les forces nord-américaines à quitter la Russie soviétique.

Alex a bien expliqué la leçon fondamentale de cette période, qui est que les révolutions ne connaissent pas les frontières. Aujourd’hui comme alors, les travailleur-euses du monde entier font face aux mêmes problèmes, et chercheront des solutions similaires. Lorsqu’une révolution éclatera dans un pays, rien ne pourra empêcher son expansion à d’autres pays. Il ne tiendra qu’à nous d’utiliser ce momentum pour assurer la victoire de la révolution socialiste.

La crise du capitalisme et la lutte des classes aujourd’hui

Pour la dernière présentation de la fin de semaine, Hubert Prévaud, rédacteur du journal marxiste Révolution de la section française de la Tendance marxiste internationale, a développé sur les perspectives pour une révolution aujourd’hui. Hubert a expliqué l’importance de la crise de 2008 comme toile de fond de tous les bouleversements politiques et sociaux de notre époque.

Analysant les développements aux États-Unis, en Amérique latine et en Europe notamment, Hubert a bien montré comment l’année 2016 a été caractérisée par un effondrement du centre politique et du libéralisme. Pour plusieurs, nous assistons à une montée de la droite, mais cette appréciation est unilatérale. Pour ce qui est de la montée de Donald Trump, par exemple, celle-ci a été accompagnée par une mobilisation sans précédent aux États-Unis contre ses politiques racistes et son agenda procapitaliste. Et c’est sans compter la campagne de Bernie Sanders de l’an dernier, qui a bien montré l’enthousiasme grandissant pour le socialisme aux États-Unis. Tout autour du monde, la crise du capitalisme provoque l’effondrement du centre politique, et dans ce processus, la radicalisation à gauche d’énormes couches de la population pourra certainement avoir des répercussions révolutionnaires. 

Fort de son expérience dans le mouvement ouvrier français, Hubert a consacré une bonne partie de sa présentation à expliquer les récents développements en France, où l’effondrement du centre politique s’exprime très clairement avec la montée de Marine Le Pen, presque assurée de passer au second tour de la présidentielle, et celle de Jean-Luc Mélenchon, du mouvement de gauche de la France insoumise. La table est mise pour la présidentielle la plus imprévisible de l’histoire de la Ve République. Cette instabilité est maintenant la norme. Les travailleur-euses de France – et d’ailleurs – cherchent une alternative au statu quo pourri, comme en a témoigné la dernière période de lutte, notamment contre la loi Travail l’an passé. Cependant, les leçons de la dernière période en Europe demeurent : toute tentative d’améliorer les conditions de vie des travailleur-euses en restant dans les limites du système capitaliste mènera à devoir se plier à ses lois. Afin de réellement lutter contre l’austérité et pour de meilleures conditions de vie, la classe ouvrière doit pouvoir compter sur une organisation dotée d’un programme authentiquement socialiste.

Construisons la Tendance marxiste internationale!

Le mot de la fin est revenu à Joel Bergman, membre de la rédaction de La Riposte socialiste. Il prit le temps de remercier les principaux organisateurs de l’événement, et a souligné à nouveau la radicalisation immense de couches de plus en plus nombreuses de la société sous la surface, ce que Trotsky appelait le processus moléculaire de la révolution. Il a expliqué l’importance de la tâche de construire une organisation révolutionnaire marxiste qui pourra être à la hauteur de la tâche de transformer la société. L’hymne des travailleurs et des travailleuses, L’internationale, chanté en français et en anglais, est venu clore cet événement.

L’École fut un rassemblement marxiste révolutionnaire mémorable. L’augmentation du nombre de participant-es, année après année, reflète le développement croissant de la conscience de classe des travaileur-euses et de la jeunesse. Face au capitalisme qui vogue de crise en crise, de plus en plus de gens se tournent vers les idées du marxisme, du bolchévisme et de la révolution d’octobre et en arrivent à cette conclusion que la seule issue est une révolution socialiste.

Il n’y a jamais eu de meilleur moment pour être révolutionnaire. Tandis que plusieurs sur la gauche désespèrent ou tombent dans le pessimisme, les marxistes regardent l’avenir avec un optimisme inébranlable. Nous avons confiance dans la capacité de classe ouvrière et la jeunesse de changer la société et de la débarrasser de toute oppression et de toute exploitation. Joignez-vous à la Tendance marxiste internationale afin de nous aider dans cette lutte pour le socialisme!