Pourquoi je suis communiste – Du moralisme écologiste au marxisme

Dans cette édition de notre série « Pourquoi je suis communiste », Patrick nous raconte comment ses expériences l’ont désenchanté par rapport à l’écologisme et l’ont poussé vers le marxisme.

  • Patrick Lepage
  • ven. 18 août 2023
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La décadence du capitalisme se fait sentir tous les jours plus durement. Cela a mené à une radicalisation croissante des travailleurs et des jeunes, qui sont des millions à rejeter le système. Selon un sondage récent, un million de Canadiens veulent le communisme. La Riposte socialiste, section canadienne de la Tendance marxiste internationale, a lancé une campagne intitulée « Es-tu communiste? » dans le but d’organiser cette couche grandissante de communistes au Canada et au Québec. Dans le cadre de cette campagne, nous ouvrons les pages de notre magazine pour demander : et vous, pourquoi êtes-vous communistes?

Si vous faites partie de ces centaines de milliers de communistes au Canada et que vous souhaitez expliquer à nos lecteurs pourquoi vous êtes communiste, vous pouvez soumettre un texte de 500 mots maximum à notre comité de rédaction à l’adresse suivante : eb@marxist.ca.


Longtemps avant de m’intéresser à la politique, j’étais assez pessimiste envers le sort de notre civilisation. Je voyais un déclin, mais sans pouvoir y mettre de mots. Par la suite, mon parcours vers les idées marxistes s’est fait assez rapidement.  

C’est quand j’ai commencé à me soucier de la question environnementale que je me suis politisé. D’abord, cela se manifestait simplement en blâmant les choix des individus, et en dénonçant les décisions des gouvernements et des entreprises d’un point de vue moraliste : je voyais ces gens simplement comme de mauvaises personnes. 

En travaillant dans une épicerie zéro déchet, je me sentais bien, croyant faire ma part pour l’environnement. Rapidement, par contre, ce sentiment s’est transformé en son contraire, et j’ai compris l’hypocrisie derrière ma façon de penser. D’une part, les aliments zéro déchet et biologiques ne s’attaquent pas à l’exploitation humaine, et d’autre part, les choix que mon employeur faisait quant à la gestion allaient à contre-sens de notre « mission sociale ». Au final, l’entreprise faisait partie de l’économie capitaliste, et malgré toutes nos nobles intentions, les intérêts économiques capitalistes finissaient toujours par gagner. Toutes les entreprises, même les plus « bio », en dernière analyse, sont obligées d’exploiter des travailleurs pour générer du profit. Alors que je jugeais les gens sur mes barèmes moraux, jamais je n’avais pointé du doigt les grosses entreprises, qui étaient la source du problème.  

J’ai donc cherché des explications ailleurs, mais rapidement, je me décourageais. Je ne me reconnaissais pas du tout dans le discours de la gauche mainstream, trop liée à l’establishment politique, plaçant tout sur des idéaux moraux et blâmant la nature humaine. Même les mesures politiques de gauche ne me parlaient pas, car je comprenais bien que toute réforme est insoutenable sous le capitalisme et que des mesures réformistes amènent nécessairement une confrontation directe avec les intérêts du patronat. Les leaders de gauche, que j’admirais tout de même, finissaient toujours par plier devant le Capital, ne menant pas la lutte jusqu’au bout. 

Mon désenchantement était total, tellement que je commençais à me tourner vers des discours de droite populiste, seul lieu où on entendait des critiques de l’establishment politique. Leur vision des choses me semblait être le gros bon sens. Honnêtement, pour moi, à cette époque, cela avait beaucoup plus de sens que tout ce que j’entendais à gauche. C’était très étrange pour moi, car il était clair à mes yeux à cette époque que le problème était le système capitaliste. Par contre, je ne trouvais pas de discours conséquent et cohérent qui aurait pu nous organiser pour lutter.

Puis, un de mes amis m’a invité dans un cercle de lecture de La Riposte socialiste. La façon dont les militants me présentaient leur analyse du système capitaliste, des luttes passées contre le système, des différents courants de pensée, etc., tout était présenté avec une rigueur et une justesse que je n’avais jamais entendue avant. Quelques mois plus tard, j’ai compris que la force des idées marxistes, c’est dans sa philosophie : le matérialisme dialectique. Si nous n’acceptons pas cette philosophie, nous tombons inévitablement dans le subjectivisme idéaliste, le postmodernisme et le cul-de-sac idéologique auquel ces idées mènent. À travers mes discussions et mes lectures, j’ai réalisé qu’il est tout à fait possible de comprendre le monde de façon objective. Et que c’est en fait essentiel si on veut renverser ce système pourri. Les marxistes ne cherchent pas à comprendre le monde selon des principes moraux, mais bien à comprendre ce qui se cache, objectivement, derrière les choix individuels.

Comme Marx l’explique : l’existence détermine la conscience. Nos conditions matérielles sont comme un terreau où certaines idées peuvent germer et où d’autres ne peuvent tout simplement pas se développer dans notre conscience. Comme un médecin doit être objectif dans son analyse pour sauver son patient, les marxistes cherchent à comprendre le monde de façon objective. Par contre, nous ne sommes absolument pas neutres sur le résultat. Car notre but est de sauver l’humanité et créer les conditions pour assurer son développement, qui est aujourd’hui totalement stagnant sous le capitalisme. Et c’est précisément pour cela que nous avons besoin d’une révolution socialiste.