Les Canadien-nes se réveillent avec les affiches électorales dans leurs rues cette semaine, alors que nous nous trouvons confrontés à une élection-mammouth de 79 jours. Le Premier ministre Stephen Harper, dimanche dernier, parlant en direct d’Ottawa, a fait l’annonce que la 42e élection fédérale canadienne serait la plus longue depuis 1872. Avec l’économie en récession et le NPD montant dans les sondages, Harper tente d’utiliser la période électorale extrêmement longue pour épuiser financièrement ses adversaires alors qu’il opte pour son quatrième mandat en tant que Premier ministre.

Normalement, une élection fédérale durerait seulement 37 jours, avec des dépenses électorales plafonnées à 25 millions de dollars pour chaque parti politique. Ceci augmente de $ 675 000 pour chaque jour supplémentaire, plaçant le montant maximum de dépenses à bien plus de 50 millions de dollars pour cette élection. Lorsque les dépenses des candidats sont prises en considération, ce chiffre gonfle à 127 millions de dollars par parti. Ça ne prend pas un génie pour comprendre que ceci est à l’avantage des Conservateurs, le parti favori de la grande entreprise au Canada. Les Conservateurs ont beaucoup plus d’amis riches, ce qui a permis au parti de ramasser plus d’argent que tous les autres grands partis combinés. En 2014, les Conservateurs ont terminé l’année avec près de 31 millions de dollars dans leurs coffres, incluant les fonds de l’association fédérale et des associations de circonscription. Ceci est à comparer avec environ 17 millions de dollars pour les Libéraux et 10 millions de dollars pour le NPD. Les dons sont d’une importance primordiale pour les partis politiques, car ils sont la seule source de financement depuis que les Conservateurs ont éliminé progressivement la subvention par vote qui fût introduite par le gouvernement Chrétien en 2004.

En mettant l’accent sur deux questions clés, Harper a lancé la campagne en déclarant: « Ceci est une élection à propos du leadership sur les grandes questions qui nous concernent tous, notre économie et la sécurité de notre nation. » En utilisant la carte la plus ancienne de la stratégie conservatrice, Stephen Harper tente de semer la peur pour gagner l’élection. En faisant référence à la montée du fondamentalisme islamique et à « l’agression russe », il essaie d’effrayer les gens afin qu’ils votent pour les Conservateurs. Il a fait des remarques cinglantes sur ses adversaires en déclarant: « Certains diront: Prenons une chance avec Justin ou Mulcair. Mais notre avenir n’est pas une loterie », et ensuite il s’en est pris ouvertement au NPD soutenu par les syndicats en disant, « La Grèce a pris une chance avec un gouvernement de gauche … qui a pris une situation terrible et l’a empiré. » Alors qu’il parlait au Québec récemment, Harper a également critiqué les politiques du chef du NPD Thomas Mulcair, les qualifiant de « socialistes et protectionnistes. »

Tout en affirmant que les actions du gouvernement conservateur ont été « prudentes », l’économie en difficulté semble contredire cela, ayant affichée cinq mois consécutifs de croissance économique négative. Il y a une contraction continue dans les sables bitumineux alors que le prix du pétrole a de nouveau chuté en dessous de 50$ le baril. En plus, il n’y a pas eu un retour des emplois manufacturiers, comme beaucoup l’avaient espéré, en raison de la faible valeur du dollar canadien, et au lieu de cela plus de licenciements ont été annoncés. Même le secteur des services a été troublé, avec des fermetures de magasins à grandes chaînes comme Target, Futureshop et Sony cette année. Dans ce contexte incertain et sombre, il est naturel que la classe ouvrière canadienne soit secouée de son apathie et commence à chercher une alternative politique.

Le tournant vers le NPD

Une histoire importante au cours des derniers mois a été la montée du NPD fédéral. Les gens commencent connecter à l’appel du parti pour des garderies à 15 $ par jour, un salaire minimum fédéral à 15$/heure et l’opposition à la guerre et à la législation « antiterroriste ». En fait, le premier sondage depuis l’annonce de l’élection a mis le NPD à 39%, en avance de 11% sur les Conservateurs et de 14% sur les Libéraux. Cette situation explique le raisonnement derrière le mouvement froid et calculé de Harper d’en appeler à des élections extrêmement longues. Il cherche à vider les coffres du NPD et à contrôler le discours politique avec des attaques dans ses publicités.

Harper a une longue histoire de manœuvres illégales pour se frayer un chemin et garantir que son emprise sur le pouvoir est ferme.

Ceci est un fait bien établi dont la plupart des Canadien-nes est maintenant au courant. Dans un sondage mené à la fin de l’année dernière, près de 70% des Canadien-nes interrogé-es ont déclaré qu’ils craignaient que les partis politiques tenteraient de « manipuler le résultat des élections futures grâce à des activités illégales. » Les changements récents apportés à la loi électorale ont renforcé la capacité des Conservateurs de supprimer le vote de ceux et celles qui sont les moins susceptibles de voter pour eux. Du scandale bien connu des appels automatisés lors de l’élection fédérale de 2011, à plus de 750 millions de dollars consacrés à la publicité gouvernementale pour vanter les réalisations des Conservateurs, ceci est juste une autre tentative de Harper pour manipuler les élections fédérales afin de garantir que l’ordre du jour des capitalistes ait les deux mains sur le volant.

Le contexte de cette élection en est un de crise économique, à la fois sur le plan national et international. Le NPD a été catapulté au pouvoir en Alberta en raison de la crise dans le secteur pétrolier. Le mécontentement de la population est à la hausse alors que les travailleurs-euses sont confronté-e-s à des licenciements et des attaques à la fois dans les secteurs public et privé. Partout, les gouvernements ont été contraints d’attaquer les travailleurs-euses et les jeunes. Ceci constitue la toile de fond générale de cette élection.

Mais qu’est-ce qui doit être fait? Est-ce que Harper sera en mesure de triompher par la peur et l’argent?

Pour les travailleurs-euses et les jeunes Canadien-nes qui espèrent vaincre le régime draconien de Harper, il est seulement naturel que des millions se tournent vers le NPD. Le NPD ne peut évidemment pas rivaliser avec les dollars des Conservateurs et sera probablement usé par la longue campagne et le barrage constant d’attaques publicitaires des Conservateurs. Le NPD ne peut pas gagner en essayant de battre les partis des entreprises à leur propre jeu. La force de la gauche est le nombre.

La façon de gagner est en mobilisant une armée de bénévoles. Alors que les Conservateurs vont utiliser l’argent pour supprimer le vote et diaboliser leurs adversaires, le vrai changement vient de bénévoles dévoués allant frapper aux portes. Mais ces bénévoles ne viendront que si le NPD adopte des politiques socialistes audacieuses qui feront une réelle différence dans la vie des travailleurs-euses, des jeunes, des immigrant-es et des femmes. En mettant de l’avant des politiques radicales qui vont à la racine des problèmes auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui, le NPD peut mobiliser et inspirer des dizaines de milliers de militant-es à travers le pays et renvoyer Harper à la poubelle de l’histoire, là où il devrait être!