Un autre clou dans le cercueil du libéralisme vert

Avec l’accélération de la crise économique et l’intensification de la guerre commerciale, l’objectif est clair : il faut faire tomber tous les obstacles au profit. Les contraintes environnementales sont perçues comme des freins à la compétitivité et doivent être éliminées.

  • Samuel Bourque
  • mar. 22 avr. 2025
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Photo : Adam Scotti (PMO)

Le vendredi 14 mars, quelques heures seulement après avoir été déclaré premier ministre, Mark Carney mettait la hache dans la taxe carbone aux consommateurs. Il s’agit d’une étape de plus dans l’agonie de l’écologisme libéral. Cette tendance prétendait pouvoir réconcilier la protection de l’environnement et les intérêts capitalistes, mais s’est avérée n’être qu’une tentative fourbe de donner un verni progressiste aux grandes entreprises et à leurs gouvernements.

Pendant des années, les libéraux fédéraux se sont présentés comme les champions d’un environnementalisme « réaliste », capable d’assurer à la fois la protection de la planète et des profits des capitalistes. Ils ont utilisé la taxe carbone pour pouvoir prétendre agir, tout en reportant le coût du problème sur les épaules de la classe ouvrière.

Maintenant, Mark Carney renonce non seulement à la taxe carbone, mais il promet aussi d’utiliser des pouvoirs d’urgence pour accélérer la construction de pipelines. Cette décision illustre parfaitement les priorités réelles de la classe dirigeante canadienne : lorsque les besoins du Capital l’exigent, toutes les entraves au profit doivent être retirées.

Au même moment, Carney a pris la décision hautement symbolique de retirer Steven Guilbeault du ministère de l’Environnement. Ce militant écologiste devenu ministre incarnait cette illusion d’un libéralisme vert. Son éviction du poste est un message clair : il n’y a plus besoin de sauver les apparences.

Dans la même veine, en janvier nous avons vu les cinq plus grandes banques du Canada quitter l’alliance bancaire Net-Zero. Cette initiative, lancée en 2021 et menée par Mark Carney lui-même, prétendait coordonner les « activités » des banques en matière climatique. Suite à l’élection de Trump, une banque américaine après l’autre a quitté l’alliance, et leurs homologues canadiennes ont rapidement suivi.

Ce revirement ne devrait surprendre personne. Depuis toujours, la préoccupation des libéraux n’était pas la protection de l’environnement, mais la préservation du système capitaliste. Maintenant que le libéralisme est en train d’être rejeté, ils abandonnent sans honte leurs prétentions.

Ce revirement ne touche pas seulement le Canada. Ces derniers temps, plusieurs banques et grandes entreprises à travers le monde reviennent sur les promesses qu’elles avaient faites lors des Accords de Paris en 2015. Elles repoussent leurs objectifs environnementaux, se rétractent sur leurs engagements climatiques ou les abandonnent tout simplement.

Alors que le GIEC estime qu’il faudrait réduire les émissions mondiales de 43% d’ici la fin de la décennie pour rester dans les limites du réchauffement, des grandes entreprises, dont Unilever, Bank of America et Shell, n’ont pas pris la peine l’année dernière d’atteindre leurs objectifs de réduction des émissions, ou les ont tout simplement abandonné. 

Walmart, en décembre dernier, a retiré une section de son site web où elle affirmait que « Si nous ne prenons pas dès maintenant des mesures plus énergiques [pour combattre la crise environnementale], les dégâts ne feront que s’aggraver et les conséquences seront désastreuses pour la génération actuelle et les générations futures ». L’année dernière, la banque HSBC a exclu le responsable du développement durable de la banque – un climatologue de formation – du comité exécutif du groupe, puis l’a remplacé par un banquier. Ces anecdotes démontrent à tous ce que les communistes disent depuis longtemps : sous le capitalisme, la recherche du profit prime sur toute autre considération, y compris la santé de notre planète.

Avec l’accélération de la crise économique et l’intensification de la guerre commerciale, l’objectif est clair : il faut faire tomber tous les obstacles au profit. Les contraintes environnementales sont perçues comme des freins à la compétitivité et doivent être éliminées.

Tant que les moyens de production seront dans les mains des capitalistes, il ne pourra y avoir aucune véritable protection de l’environnement. Cela signifie qu’il existe une seule solution pour sauver la planète : arracher les entreprises des mains des capitalistes pour les placer sous le contrôle démocratique des travailleurs. Seule une gestion collective et planifiée rationnellement de l’économie peut permettre une véritable transition écologique, en mettant les ressources au service des besoins de la majorité plutôt que de prioriser les profits de quelques-uns.