Le réchauffement climatique, l’énergie nucléaire et les questions environnementales occupent en permanence l’actualité. Un certain nombre « d’écologistes » – tel Nicolas Hulot – prétendent que les questions environnementales transcendent la lutte des classes et l’opposition entre riches et pauvres. Balivernes ! Les problèmes écologiques, et la catastrophe environnementale potentielle à laquelle nous faisons face, sont les produits du système de capitaliste.

Il est vrai que les capitalistes vivent sur terre, eux aussi, et de ce point de vue, on pourrait dire que la dégradation de l’environnement n’est pas dans leur intérêt. Mais les conséquences environnementales du capitalisme ne dépendent pas de la volonté individuelle – qu’elle soit bonne ou mauvaise – de tel ou tel capitaliste. Elles découlent du mode de fonctionnement du système capitaliste, dont la force motrice est la recherche du profit.

C’est ainsi que le marxisme analyse la dégradation de l’environnement. Comme l’écrivait Engels, vers la fin de sa vie : « Là où des capitalistes individuels produisent et échangent pour le profit immédiat, on ne peut prendre en considération au premier chef que les résultats les plus proches, les plus immédiats. Pourvu qu’individuellement le fabricant ou le négociant vende la marchandise produite ou achetée avec le petit profit d’usage, il est satisfait et ne se préoccupe pas de ce qu’il advient ensuite de la marchandise et de son acheteur. Il en va de même des effets naturels de ces actions. Les planteurs espagnols à Cuba qui incendièrent les forêts sur les pentes et trouvèrent dans la cendre assez d’engrais pour une génération d’arbres à café extrêmement rentables – que leur importait que, par la suite, les averses tropicales emportent la couche de terre superficielle désormais sans protection, ne laissant derrière elle que les rochers nus ? Vis à vis de la nature comme de la société, on ne considère principalement, dans le mode de production actuel, que le résultat le plus proche, le plus tangible ; et ensuite on s’étonne encore que les conséquences lointaines des actions visant à ce résultat immédiat soient tout autres, le plus souvent tout à fait opposées ». (Engels – Le rôle joué par le travail dans la transition du singe à l’homme.)

Certes, la dégradation de l’environnement n’est pas propre au capitalisme. Dans une lettre à Engels, Marx observait déjà que « l’agriculture, quand elle progresse d’une manière primitive et n’est pas consciemment contrôlée, laisse des déserts derrière elle – la Perse, la Mésopotamie, la Grèce, etc. » Dans une économie non planifiée, il ne peut y avoir de prise en compte sérieuse des questions environnementales.

Aujourd’hui, l’anarchie capitaliste génère un désastre environnemental à une échelle infiniment plus vaste que dans les sociétés antiques ! La dégradation de l’environnement ne rentre tout simplement pas en ligne de compte dans l’activité du capitaliste individuel. Et pourtant, la somme de ces actes individuels peut constituer une menace environnementale grave.

Le réchauffement climatique

Le plus grand danger auquel le monde est aujourd’hui confronté est le réchauffement climatique. Les scientifiques s’accordent largement pour affirmer que la terre se réchauffe, et que l’activité humaine y contribue, même si nous ne savons pas exactement dans quelles proportions. Il est vrai que la terre est toujours passée par des périodes de réchauffement et de refroidissement. Mais depuis les années 80, en particulier, la vitesse du réchauffement de la planète s’est nettement accélérée. De plus en plus de gaz à effet de serre – dont le CO2 – sont rejetés dans l’atmosphère, du fait de la combustion d’énergies fossiles. En retenant la chaleur du soleil dans l’atmosphère, ces gaz fonctionnent comme une serre. Cela a déjà provoqué des sécheresses, des extinctions d’espèces, des inondations et une augmentation du niveau de la mer. Les glaciers et la glace polaire fondent. Les eaux profondes de la calotte glacière ne retiennent plus la chaleur. Le pergélisol (sous-sol glacé) de la toundra fond et n’emprisonne plus le CO2.

D’autres activités humaines aggravent encore la situation. Actuellement, les capitalistes déciment la forêt tropicale amazonienne. L’objectif est – là encore – le profit à court terme, sous la forme de champs de soja, d’exploitations forestières ou d’élevages de bétail. Une partie de la terre dénudée est déjà devenue stérile. La forêt tropicale amazonienne abrite environ la moitié des espèces du monde. Mais en outre, la forêt est un piège à CO2.

Le fameux « protocole de Kyoto », qui date de 1998, prévoyait de ralentir la hausse des émissions de CO2 (et non de réduire ces émissions). Les Etats-Unis n’ont pas signé ce protocole. Or, avec moins de 5 % de la population mondiale, ils sont responsables d’un quart de toutes les émissions de CO2. L’accord de Kyoto est donc vidé de beaucoup de son contenu. Mais de toute façon, de nombreux pays signataires ne parviennent pas à atteindre les objectifs fixés par l’accord. Il est très difficile, pour un pays capitaliste, de contrôler les activités de dizaines de milliers de sociétés capitalistes qui rejettent du CO2 – et qui ont besoin de rejeter du CO2 pour faire des profits.

La surpêche

« Imaginez ce qu’on dirait d’une bande de chasseurs tirant un filet d’un kilomètre entre deux énormes véhicules tout-terrain et progressant à grande vitesse à travers les plaines d’Afrique. Cet attelage fantastique, comme tiré du film Mad Max, ramasserait tout sur son passage : les prédateurs – tels que des lions et les guépards–, les herbivores en voie d’extinction – rhinocéros et éléphants –, les troupeaux d’impala et de gnous, des familles de phacochères et de chiens sauvages, etc. Des femelles enceintes seraient emportées et traînées, et seuls les plus jeunes seraient capables de passer au travers des mailles du filet… Il n’y aurait aucun débouché pour environ un tiers des animaux qu’ils auraient attrapés parce qu’ils ne seraient pas suffisamment bons ou parce qu’ils seraient simplement trop petits ou trop écrasés. Ce tas de cadavres inutiles serait abandonné sur la plaine aux charognards. Cette façon efficace, mais extrêmement non-sélective, de tuer des animaux est connue sous le terme de chalutage. » (Charles Clover. Le bout de la ligne : comment la surpêche change le monde et ce que nous mangeons, Editions Ebury, 2005.)

Cela ne devrait pas être autorisé, mais c’est ce qui se produit. Lorsque les Grands Bancs de pêche, au large de Terre-Neuve, ont été découverts, on disait – avec une pointe d’exagération – qu’on pouvait marcher sur l’eau, sur le dos des poissons, sans se mouiller les pieds. A présent, les Grands Bancs ont vécu et la morue de l’Atlantique est une espèce en voie de disparition. C’est aussi le cas du marlin bleu. Il en sera bientôt de même pour le maquereau. Les chaluts détruisent la chaîne alimentaire entière, au fond des mers. Ainsi, les Grands Bancs, interdits à la pêche en 1992, ne s’en sont toujours pas remis. La pêche excessive est un exemple typique de la façon dont la cupidité des capitalistes nous conduit à un désastre environnemental.

Clover est un journaliste du Daily Telegraph ; aussi n’attendez pas de lui une analyse socialiste. Mais il met le doigt sur le cœur du problème lorsqu’il décrit la façon dont les pays européens subventionnent les chalutiers pour accroître la surpêche ; comment l’industrie de la pêche mendie des subventions pour compenser la baisse des stocks de poissons dont elle est responsable ; et comment, après avoir pillé nos côtes, ces chalutiers naviguent vers l’Afrique pour y décimer les fonds de mers. Ce faisant, ils brisent la vie des pêcheurs locaux, qui depuis des générations pêchent raisonnablement sur leurs côtes.

Les écologistes « catastrophistes »

Face aux questions environnementales, nombre d’écologistes avancent par ailleurs l’idée qu’il y a « trop d’humains sur la terre » et « pas assez de ressources. » Ces idées rappellent celles d’un économiste réactionnaire du nom de Thomas Malthus (1766-1834). Malthus expliquait que la croissance démographique entrait en contradiction avec les ressources économiques de la planète. En son temps, il pensait que la Grande-Bretagne était déjà surpeuplée. Lorsqu’il écrivait cela, il y avait probablement moins de 10 millions de personnes en Grand-Bretagne. La moitié travaillait dans le secteur agricole. A présent, la Grande-Bretagne fait vivre 60 millions de personnes, dont moins de 5% seraient nécessaires pour produire la nourriture de tous. Certes, elle ne produit pas réellement toute sa nourriture. Mais elle exporte des produits manufacturés – et de plus en plus de services financiers – pour acheter de la nourriture en provenance d’autres pays. La variable essentielle que Malthus oubliait, c’est l’augmentation de la productivité du travail humain.

Nos écologistes « catastrophistes » commettent le même type d’erreur. Il est vrai que les ressources en énergies fossiles sont limitées. Mais d’une part, on ne connaît pas exactement ces limites. D’autre part, toutes les projections des « catastrophistes » refusent de considérer la possibilité d’investissements massifs dans des énergies alternatives. Certes, de tels investissements sont impossibles sous le capitalisme, notamment en raison des intérêts en jeu, tels que ceux des capitalistes du secteur pétrolier. L’autre problème, c’est que les énergies « renouvelables » – vents, marées, etc. – ne sont pas prises au sérieux par les capitalistes, car elles ne présentent pas de perspectives de profit suffisantes, à court terme. Par conséquent, ils ne financent pas sérieusement la recherche dans ces domaines.

Cependant, le capitalisme n’est pas le dernier mot de l’histoire ! Et il n’y a aucune raison de penser qu’une société socialiste – qui accorderait les besoins humains et les ressources naturelles de façon rationnelle – ne parviendrait pas à développer massivement l’utilisation des énergies « renouvelables ». En outre, le socialisme mettrait un terme au monstrueux gaspillage que génère le système capitaliste. En arrachant les ressources naturelles au chaos du « marché » capitaliste, une planification socialiste de l’économie s’appuiera sur toutes les ressources humaines et scientifiques disponibles pour développer le niveau de vie de la population, tout en préservant les équilibres écologiques de la planète.