Une fois de plus, les mesures d’austérité dévoilent leur vrai visage hypocrite. Selon plusieurs médias, la Société des Transport de Montréal (STM) a majoré les salaires de ses dirigeants de 6.5% comparativement aux salaires de l’année précédente. Carl Desrosiers, le Directeur général de la Société, de même que les hauts cadres les mieux payés, ont reçu un salaire de 313.212.00.$ en 2013, soit une augmentation de 5.5% par rapport à l’année 2012. Au total, la STM a dépensé près de 2.7 millions de dollars en salaires pour les seuls membres du Conseil d’administration. Il s’agit d’une augmentation de 5.3% depuis 2012. Tout cela arrive au moment où la STM vient d’annoncer qu’elle appliquera un budget d’austérité. Ce budget, annoncé en janvier dernier, prévoit des coupures de l’ordre de 65 millions de dollars, ce qui a mené à une baisse de service dans les autobus de 3.1%, ainsi qu’à une hausse des titres de transport de 3.2%. Ces coupures ont pour résultat un manque récurrent de personnel dans les stations de métro, spécialement du personnel d’entretien, laissant de nombreuses stations sales et mal entretenues. Comme si ce n’était pas assez, le tarif mensuel sera augmenté dès janvier 2015 de 79,50$ à 82$ pour les utilisateurs réguliers et de 47,25$ à 49,25$ pour les jeunes, les étudiant-e-s et les personnes âgées. C’est sans surprise que le taux de satisfaction à l’égard du service dans le métro a chuté de 7% au cours de la présente année. Tandis que les salaires de la majorité des Québécois-es stagnent ou déclinent, le coût des services publics n’a pas cessé d’augmenter, et ce à un rythme soutenu. Ces augmentations de tarifs, combinées aux coupures de service, constituent une véritable gifle au visage des travailleurs-euses et de la jeunesse du Québec, spécialement de ceux qui comptent sur les transports publics pour se déplacer.

Selon la porte-parole de la STM, Amélie Régis, les augmentations de salaires consenties aux cadres et aux dirigeant-e-s sont basées sur leur performance, leur contrat stipulant des moyennes d’augmentations pouvant aller de 2% à 5%. Pour couronner le tout, ces mêmes dirigeants bénéficient d’une augmentation contractuelle supplémentaire de 2.5% pour combler l’augmentation du coût de la vie. L’hypocrisie des dirigeant-e-s de la STM, qui reçoivent en salaire bien au-delà de 200 000 dollars par année, additionnés d’une hausse de 2.5% pour couvrir le coût de la vie, est un fait connu de tous. Les travailleurs-euses, de leur côté, reçoivent-ils une telle majoration de salaire? Le journal The Montreal Gazette a récemment obtenu des informations à l’effet que les augmentations de salaires octroyées aux dirigeant-e-s de la STM s’étendent à des sections plus larges de hauts cadres qui ont reçu pour leur part plus de 10% d’augmentation en 2012. L’hypocrisie a franchi un seuil supplémentaire quand le président du Conseil d’administration de la STM, Philippe Schnobb, a été nommé à ce poste par Denis Coderre l’automne dernier. Comme nous l’avons expliqué précédemment (voir l’article sur les employés du secteur municipal), Coderre est parti en guerre contre les employé-e-s municipaux au nom de « l’équilibre budgétaire », en répétant sans cesse que les travailleurs-euses doivent faire leur part en vue de diminuer la dette du gouvernement. De toute évidence, les rigueurs budgétaires ne s’appliquent pas aux gestionnaires de la Société des Transports de Montréal.

Ce n’est pas la première fois que les haut-e-s dirigeant-e-s de la STM s’octroient des hausses salariales. En 2013, ils ont vu leur salaire grimper de 6.5% ; en 2012, c’était 10%, tandis que d’autres ont vu leur salaire monter en flèche de 17%, et ce au moment même où le gouvernement du Parti libéral invite les travailleurs-euses à se serrer la ceinture. Dans ce contexte, comment les dirigeant-e-s de la STM peuvent-ils des justifier ces hausses de salaires vertigineuses? Selon Amélie Régis, porte-parole de la STM, les salaires des dirigeant-e-s, qui sont basés sur leur performance, ont été évalués plus tôt cette année, et ce avant que les mesures d’austérité aient été implantées. Une autre raison invoquée est qu’il faut octroyer des incitatifs financiers généreux aux gestionnaires si l’on veut que ceux-ci demeurent à la STM.

Il s’agit là de piteuses excuses qui ne convainquent guère. Tandis que les gestionnaires se gavent de « bonus », le système de transport, lui, ne cesse de se détériorer. Et avec les nouvelles mesures d’austérité annoncées, on ne voit pas la lumière au bout du tunnel ; car les gestionnaires sont récompensés précisément en fonction du nombre de personnes qu’ils congédient, pas en fonction des améliorations de service. Les onze gestionnaires qui sont à la tête de la STM ne sont évidemment pas ceux qui conduisent les wagons, lavent, entretiennent les stations de métro, ou distribuent les billets dans les guichets et aident les usagers à se repérer dans le réseau. Les travailleurs-euses de la STM sont les mieux placé-e-s pour savoir ce qu’il faut faire pour améliorer le service. Ils connaissent les délais, les tarifs, la manière dont il faut opérer la machinerie, ce qui n’est pas le cas des gestionnaires, qui ne sont en fin de compte que des empêcheurs de tourner en rond, des parasites interférant dans le travail des ouvriers et ouvrières, comme en témoigne les incessantes coupures dans le personnel. L’idée selon laquelle il faut rémunérer les dirigeant-e-s pour ces coupures est une absurdité, une aberration qui va au-delà de toute logique.

Évidemment, ces parasites ne feront rien pour changer la situation. Au lieu d’opérer la STM en fonction des besoins de la population, les membres de l’exécutif ont bien fait connaître leurs intentions : gérer le système de transports comme une entreprise privée, basée sur la maximisation des profits. Les employé-e-s des transports savent mieux que quiconque ce qu’il faut faire pour améliorer le système dans son ensemble de même que son accessibilité. Si les managers actuels se révèlent incapables de remplir cette mission, il incombe alors aux travailleurs-euses, démocratiquement élu-e-s par leurs pairs, de prendre le relais afin de réaliser les réformes qui s’imposent pour rendre le service efficace et accessible à tous. Seul un système de transports publics directement contrôlé par les travailleurs-euses peut à la fois garantir la protection des emplois syndiqués et l’amélioration de la qualité du service.

Le capitalisme pénètre maintenant dans toutes les sphères de la vie, menaçant les services publics de privatisation. Cela ne vise pas uniquement la STM, mais tous les secteurs comme l’éducation et les soins de santé. Au lieu de payer grassement des gestionnaires pour occuper des sinécures à la STM, ces sommes pourraient servir à diminuer les tarifs et engager plus de personnel. Loin de diminuer les services, il faut au contraire réinvestir massivement dans les transports publics, et ce dans l’objectif d’étendre le service à de nouvelles zones, d’en améliorer la qualité, l’accessibilité, tout en visant la gratuité. Les détracteurs de la gratuité des transports opposent toujours l’argument des pertes financières. D’un strict point de vue capitaliste, ils ont raison, puisque leur seul motif est le profit. D’une perspective socialiste, à l’inverse, l’impératif du profit étant écarté, les gains de productivité découlant d’un service efficace et gratuit seront immenses. Les travailleurs-euses ont besoin de se déplacer pour se rendre à leur travail. C’est une réalité de la vie. Combler ce besoin grâce à un système de transport en commun efficace et gratuit constitue une nécessité économique vitale qui est du rôle de la société dans son ensemble. Le culte individuel de la voiture, savamment entretenu par les grands constructeurs automobiles et l’industrie pétrolière, a dépassé son heure. Le gaspillage des ressources qu’il engendre, les dommages à l’environnement qu’il provoque, en font un moyen de transport que l’on peut raisonnablement qualifier d’inefficace.

Aux yeux d’un nombre croissant de travailleurs-euses et d’une large section de la jeunesse, l’existence d’un système de transport gratuit, accessible et de qualité apparaît de plus en plus incompatible avec le fonctionnement même du capitalisme. Et ils ont raison! Dans une société socialiste, il sera possible de d’établir un vaste plan de transports publics qui prendra en compte les besoins réels de la population tout en protégeant l’environnement.